La liberté est-elle une donnée ou une conquête ?

 

Qu’est-ce que la liberté ?

   Associée à l’oiseau qui vole sans barrières, la liberté, c’est d’abord le fait de ne pas être captif, de ne pas être en prison d’où l’expression « libérer un prisonnier », de ne plus servir un maître comme lorsqu’on affranchi un esclave.

  La liberté autrefois apparentée à ce sens concret, évoque aujourd’hui les vacances, les loisirs, les lieux où les contraintes sont absentes. Une nouvelle définition est en quelque sorte apparue, la liberté correspondrait au fait de faire ce qu’on veut sans contraintes.

   Cette définition se trouve ainsi tout de suite confronté à la morale dans la mesure où la liberté de chacun ne doit pas empiéter sur la liberté d’autrui.

   Cette notion de liberté regroupe une multitude de concepts ; la liberté d’expression, la liberté de conscience, d’association… On peut donc définir des concepts proches tels que le libre-arbitre, l’autonomie, l’indépendance, la spontanéité, … mais qui n’appartiennent pas au concept lui-même.

   On peut donc noter que la liberté se caractérise par trois actions principales : savoir – vouloir – pouvoir. Savoir dans le sens où il faut être informé avant de vouloir, c’est-à-dire choisir véritablement en toute conscience de cause et avec fermeté pour mieux pouvoir, c’est-à-dire avoir les capacités, les moyens d’agir.

   Si l’homme est victime de multiples phénomènes qui le poussent à s’assouvir et à ne plus penser par lui-même, est-il envisageable de trouver un moyen de se sentir libre et d’exercer sa liberté ?

Dans la mesure où, comme l’affirme Rousseau dans Du contrat social, comment expliquer que : « L’homme est né libre, et partout, il est dans les fers ».

1- « Être libre » est la nature de l’homme

   L’homme est une créature unique en son genre qui se distingue par sa pensée. Dieu lui-même dans La Bible dit « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance » (Genèse 1:26). Nous sommes donc en d’autres termes à l’image de Dieu, un être doué de puissance et capable de prendre ses propres décisions, de créer ex-nihilo toute chose. Par extension, il apparaît aussi évidemment que nous avons été créés avec le libre-arbitre et donc notre nature même est d’être libre.

    Cependant, il peut apparaître un obstacle naturel qui peut s’opposer à la nature de l’homme, le déterminisme. C’est une notion qui implique que chaque évènement est déterminé en vertu du principe de causalité, du passé et des lois de la physique et qui tendrait vers l’absence de la nature libre de l’homme. Le déterminisme prédit une conséquence compte tenu des causes. La nature physique nous imposerait donc ses lois ; par extension, une question plus fondamentale se pose alors : si, comme le suggère la science, la nature est un système de relations de causes à effets nécessaires, comment la liberté peut-elle être possible ? Le physicien Laplace, dans Essai philosophique sur les probabilités, affirme que l’état présent de l’univers est déterminé par son état antérieur et permet par extension de prédire son état futur. Comment imaginer dans de telles circonstances que puisse exister une cause produisant librement ses effets, c’est-à-dire sans que son action puisse s’expliquer par des causes extérieures ?

     Kant propose de répondre à cette question en distinguant deux phénomènes dans sa Critique de la raison pure : d’une part, l’ordre des phénomène naturels tels qu’il est établi par la pensée scientifique implique qu’il existe « une liaison d’un état dans le monde sensible avec un état précédent auquel il succède suivant une règle ». Il s’agit donc du déterminisme qui « repose sur des conditions temporelles » ; et par extension, il rappelle ce phénomène : « La causalité de la cause de ce qui arrive ou commence d’être a elle aussi commencé d’être et elle requiert elle-même, conformément au principe de l’entendement, à son tour une cause. ». D’autre part, il expose aussi clairement l’ordre des choses en soi dont nous n’avons aucune connaissance directe, qui propose d’imaginer qu’existe en soi une volonté libre et spontanée. C’est en ce sens qu’il nous dit : « une liberté dont la causalité n’est donc pas à son tour soumise, selon la loi de la nature, à une autre cause qui la déterminerait suivant le temps ». Cette « liberté » comme il l’appelle, ou ce phénomène est donc capable de produire ses effets sans être nécessairement lié à la nécessité naturelle. Nous ne la connaissons pas vraiment mais l’expérimentons comme un fait, il présente « La liberté entendue au sens pratique est l’indépendance de l’arbitre vis-à-vis de la contrainte exercée par les penchants de la sensibilité. ». Cette nouvelle forme de liberté s’apparente donc à la conscience et se traduit donc par la spécificité de l’espèce humaine dont la nature est d’être libre. La nature de l’homme fait donc que nous pouvons maîtriser ses lois, ce qui donne donc à l’humanité tout son sens.

     De plus, l’idée de nature humaine a pu être évoquée pour justifier l’impossibilité d’agir librement : si l’homme est lui-même un être naturel, et une partie de la nature, comment affirmer qu’il est libre ? Le fait que l’homme a une nature, et qu’il est soumis à une nécessité biologique, génétique physiologique… n’entraîne-t-il pas nécessairement qu’il lui est impossible d’être libre ? Au contraire, ce qui fait de chaque être humain un être libre, c’est la capacité qu’a notre conscience, notre volonté de pouvoir se projeter dans l’avenir, de pouvoir planifier son avenir, de réaliser ses projets pour être libre. La culture permet de placer chaque homme au centre d’un univers qui lui correspond, c’est-à-dire proprement humain. C’est ce qu’on appelle liberté, une situation dans laquelle l’inscription de chaque être humain lui impose de prendre en considération la situation dans laquelle il se trouve pour pouvoir connaître et agir en conséquence. C’est en ce sens que Sartre dans L’existentialisme est un humanisme dit : « L’homme existe d’abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu’il se définit après. […] L’homme est non seulement tel qu’il se conçoit, mais tel qu’il se veut, et comme il se conçoit après l’existence, comme il se veut après cet élan vers l’existence, l’homme n’est rien d’autre que ce qu’il se fait. » L’homme donne donc un sens aux situations auxquelles il fait face et c’est ainsi que ce mot liberté prend tout son sens. Rousseau, dans Du contrat social, confirme cette idée au chapitre VIII : « Ce passage de l’état de nature à l’état civil produit dans l’homme un changement très remarquable, en substituant dans sa conduite la justice à l’instinct, et donnant à ses actions la moralité qui leur manquait auparavant. » On voit donc ici que la liberté se trouve dans ses actions. Nous pouvons donc dire que la nature de l’homme reste sa capacité de réfléchir par lui-même, d’agir en conséquence et, ainsi, donner tout son sens à sa liberté.citation 1

     L’homme est aussi autonome. Ce terme est issu du grec nomos, « loi », et auto, « moi-même », et qui signifie la faculté de réguler soi-même son action en se référant à des lois dont on reconnaît la pertinence. La première condition de l’autonomie, c’est la capacité de se gouverner soi-même, de pouvoir maîtriser sa conscience, sa liberté, sa nature en tant qu’homme. Comme le suggèrent les stoïciens, c’est dans la raison que se joue notre maîtrise de nous-mêmes et notre bonheur. L’exercice de la volonté porte d’abord sur la maîtrise de nos désirs et de nos aversions, et comme le suggère Descartes dans son Discours de la Méthode, « Ma troisième maxime était de tâcher […] à changer mes désirs que l’ordre du monde. » dans le sens où il pense que la volonté permet d’éviter de désirer l’impossible. La liberté est donc aussi un pouvoir de se mettre en accord avec ce qui arrivera inéluctablement : elle est donc l’essence de l’homme, qui est naturellement doué de conscience, c’est-à-dire, selon Descartes, de la faculté de penser.

     Ainsi, comme le répète Rousseau dans Du contrat social, l’homme est naturellement libre : « Sa première loi est de veiller à sa propre conservation, ses premiers soins sont ceux qu’il se doit à lui-même, et sitôt qu’il est en âge de raison, lui seul étant juge des moyens propres à se conserver devient par là son propre maître ». C’est pourquoi, il dit dans le même ouvrage : « Renoncer à sa liberté […] est incompatible avec la nature de l’homme, et c’est ôter toute moralité à l’homme que d’ôter toute liberté à sa volonté. »

  Toutefois, il apparaît clairement, que chaque être humain se laisse dominer par des pouvoirs extérieurs qui l’écartent de sa nature propre.

2- L’homme, un être plongé dans la servitude et l’oppression

      Même si sa nature est d’être libre, l’homme s’enferme naturellement dans la servitude, et se trouve confronté à de multiples formes d’oppression. Hormis le fait qu’il peut y être brutalement contraint, l’homme semble trop souvent consentir à servir les intérêts d’un autre. Pourquoi les opprimés, plus nombreux que leurs oppresseurs, ne brisent-ils pas le joug qui s’exerce sur eux ? La domination est trop souvent consentie, d’autant plus que certains subissent en croyant y échapper. C’est ce que dit La Boétie dans Discours de la servitude volontaire : « La nature de l’homme est d’être libre et de vouloir l’être, mais il prend facilement un autre pli lorsque l’éducation le lui donne », c’est-à-dire que les oppressés ne sont pas poussés à agir et petit à petit obéissent sans plus y réfléchir. Tel est l’exemple que l’auteur donne : « Voilà ce qui arrive aux plus braves chevaux qui d’abord mordent leur frein, et après s’en jouent, qui, regimbant naguère sous la selle, se présentent maintenant d’eux-mêmes sous le harnais et, tout fiers se rengorgent sous l’armure. » La Boétie montre bien que les sujets s’enferment d’eux-mêmes dans la servitude et s’éloignent de leur liberté : « Ils pensent qu’ils sont tenus d’endurer le mal, s’en persuadent par des exemples et consolident eux-mêmes, par la durée, la possession de ceux qui les tyrannisent ».

     De même, comme le reconnaît Rousseau dans Du Contrat social, « les esclaves perdent tout dans leurs fers, jusqu’au désir d’en sortir ; ils aimaient leur servitude comme les compagnons d’Ulysse aimaient leur abrutissement », à savoir la réduction à l’état bestial dont ils sont les sujets. Ce consentement, cette obéissance, cette soumission est obtenue par la manipulation des opinions, grâce aux médias, et par l’exploitation d’un certain nombre d’illusions et de préjugés. On a pu l’observer notamment lors de la seconde guerre Mondiale où les Allemands avaient été endoctrinés dans l’idéologie nazie. On comprend que Hume, dans Essais moraux, politiques et littéraires et autres essais, démontre que la force de l’opinion fonde le pouvoir du gouvernement quel que soit le régime en place. C’est en ce sens qu’il écrit : « Rien ne paraît plus surprenant (…) que la soumission tacite avec laquelle les hommes sacrifient leurs propres sentiments et leurs propres passions à leurs chefs. »  Cette opinion doit être un sentiment qui « procure la conviction selon laquelle le gouvernement établi est aussi avantageux que tout autre pouvant être aisément mis en place. » Ainsi, le peuple, puisqu’il détient la force, confère, par son obéissance aveugle issue de l’opinion qu’il a du gouvernement, une grande sûreté à ce dernier. De plus, les esprits fragiles se retrouvent parfois confrontés à des actes qu’ils jugent bons pour la liberté pour leur pays, mais il ne s’agit que de fanatisme. Les plus grands combattants d’une cause, qui est ici la liberté, se retrouvent être souvent ses pires ennemis, comme le montre par exemple Arendt dans Eichmann à Jérusalem. Le Nazi Eichmann, lors de son procès à Jérusalem, apparaît comme un fanatique, dans le sens où il est persuadé de défendre une cause qu’il juge morale, et qui permettrait, dans le futur, de donner lieu à un monde meilleur. C’est pourquoi, le fanatisme autour de la liberté peut être interprété de multiples manières : il s’agit donc de réfléchir sur les conditions d’exercice de la liberté et sur les fausses idées que nous sommes bien souvent tentés d’avoir.citation 2

      Par ailleurs, l’homme est aussi soumis à des faux-semblants. Il importe de ne pas confondre la licence, c’est-à-dire l’absence totale de contraintes, et la liberté, c’est-à-dire pouvoir faire ce que l’on veut. Or, l’homme reste un être de désir. Il est soumis à des passions qui l’aliènent bien davantage qu’elles ne le libèrent. De même, si je suis contraint d’admettre qu’une action est meilleure qu’une autre, alors je ne suis pas libre parce que je n’ai pas le choix. En réalité, il en est tout à fait autrement mais pour le savoir, on nécessite la connaissance. Il est possible de remettre en question ou d’adhérer à toute idée proposée, et c’est à chacun de reconnaître les qualités de chaque argument pour se libérer, même si cette démarche apparaît parfois comme un acte difficile. L’ignorance n’est donc guère favorable à l’exercice de la liberté : elle en donne très souvent l’illusion. Nous pouvons imaginer être libre, alors qu’en réalité, nous sommes la marionnette d’éléments extérieurs, mais dont nous n’avons pas conscience. Tel est le sens de la thèse de Spinoza dans son Ethique : « L’expérience elle-même montre, non moins clairement que la raison, que les hommes se croient libres pour la seule raison qu’ils sont conscients de leurs actions, et ignorants des causes par quoi elles sont déterminées ». Ainsi, il donne l’exemple d’un bébé qui croit aspirer librement le lait de sa mère, un peureux qui choisit la fuite etc. Le sentiment de liberté est ici trop souvent lié à l’irréflexion et à l’ignorance dans laquelle les vraies causes nous poussent à agir de tel ou telle façon. Nous nous croyons libres alors même que parfois nous subissons des évènements. On peut donc dire que le sentiment de liberté n’est pas forcément une garantie de liberté.

COMMENT L’HOMME PEUT-IL SE RENDRE LIBRE ? Néanmoins, il existe de multiples situations où l’Homme se retrouve destitué de sa liberté sans même qu’il s’en rende compte. Ainsi, peut-on malgré notre nature être libre et exercer notre liberté dans notre société actuelle ?

3- La liberté dans notre société reste une conquête perpétuelle

     La liberté est au centre de notre existence, et même si l’homme est naturellement libre, il reste toujours menacé par l’oppression. Dans nos sociétés actuelles, si l’autonomie du jugement individuel est une garantie nécessaire pour la liberté, paradoxalement, cette autonomie est, d’abord, l’effet d’une association entre les hommes. En effet, la liberté est originairement politique, c’est-à-dire civile, et une vie politique digne de ce nom suppose la liberté de choisir ses dirigeants. Cette liberté originaire n’est pas la liberté d’examen ou de jugement personnel mais, d’abord, celle qui règle les modalités de la vie en communauté. A ce sujet, Rousseau écrit donc dans Du contrat social : « Ce que l’homme perd par le contrat social, c’est sa liberté naturelle et un droit illimité à tout ce qui le tente et qu’il peut atteindre » ; en d’autres termes, dans une telle situation, comme il n’existe aucune loi, ma force est mon droit. « Ce qu’il y gagne, c’est la liberté civile et la propriété de tout ce qu’il possède ». Il s’agit donc d’une liberté conforme aux intérêts de tous, à l’intérêt commun nécessaire dans la vie en communauté.citation 3 La formule selon laquelle « La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres » n’est pas la loi qui articule mon existence avec l’existence des autres comme l’écrit Rousseau dans ce même ouvrage : « L’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite (=imposée) est liberté ». C’est la condition nécessaire à la liberté de tous. Quel serait en vérité mon pouvoir d’action réel, donc ma liberté, si je vivais seul, privé de l’humanité et de l’association humaine qui a été construite depuis des millénaires ? La vie sociale est donc obstinément la condition même de la liberté.

     Or, toute vie sociale n’est pas libératrice. Si on admet que l’exercice du pouvoir politique permet de coordonner les libertés individuelles, d’éviter les conflits et de favoriser leur épanouissement que ce soit la liberté d’expression, la liberté d’association ou encore la liberté de presse, l’histoire nous a montrés à de multiples reprises que de nombreux Etats restent plus dominateurs que libérateurs. Le pouvoir politique est alors confisqué par une minorité qui, en légitimant son pouvoir, en fait en réalité l’instrument de sa domination sur le peuple tel qu’on a pu le voir, par exemple, pendant la monarchie française. C’est ce qu’affirme Emile Durkheim dans L’Etat et la société civile : « Comme toutes les formes de la nature, s’il n’est limité par aucune puissance collective qui le contienne, il [à s’avoir l’Etat] se développera sans mesure et deviendra à son tour une menace pour les libertés individuelles. ». Parfois même, ses régimes essayent d’imposer le libéralisme, et c’est donc au nom de la liberté que cette domination se met en place. C’est la raison pour laquelle l’exercice du pouvoir est souvent l’objet de méfiance a priori. Comme l’affirme Rousseau dans Du contrat social, parfois, l’Etat fait passer les intérêts des dirigeants et/ou intérêts particuliers avant ceux du peuple contre la réelle volonté générale, définie par cet auteur comme la volonté du peuple ; ce qui s’énonce ainsi : « Je fais avec toi une convention toute à ta charge et toute à mon profit, que j’observerai tant qu’il me plaira et que tu observeras tant qu’il me plaira. »

    Sans aller jusqu’aux théories anarchistes, qui proposent une disparition totale du pouvoir de l’Etat, il apparaît légitime de soumette celui-ci à un encadrement rigoureux. La séparation des pouvoirs permet donc de garantir les libertés du peuple avec d’un côté le pouvoir législatif qui rédige les lois et les voter par les représentants du peuple, d’un autre le pouvoir exécutif qui met applique les lois votées et, enfin, le pouvoir judiciaire qui punit les individus qui transgressent les règles établies. Dans le cas où le gouvernement intervient dans toutes ces branches, il peut alors conduire au plein pouvoir pour le chef du gouvernement, ce qui est néfaste pour les libertés individuelles du peuple. Malgré tout, dans nos sociétés actuelles, la rigoureuse séparation entre ses pouvoirs garantit l’égalité des citoyens devant la loi et donc par extension la liberté de tous ; du moins abstraitement. Il s’agit donc d’une garantie de l’exercice des libertés individuelles comme l’admet Hegel dans les Principes de la philosophie du droit : « L’Etat est l’effectivité de la liberté concrète », c’est-à-dire qu’il en est la réalisation effective. Il affirme ici que l’Etat permet d’adopter un point de vue universel qui concilie les aspirations des individus, telle est sa mission. Les individus qui sont en droit d’attendre de l’Etat la garantie de leurs libertés doivent gouverner leur volonté individuelle en fonction de l’intérêt de tous. La société civile, quand elle est saine, permet donc aussi d’atteindre sa liberté ; même s’il ne s’agit que de l’aboutissement de combats et d’une conquête primordiale.

    De plus, alors que nos dirigeants prônent l’égalité, il apparaît que liberté et égalité ne sont compatibles qu’à certaines conditions Il existe une passion de l’égalité qui empêche toute perspective de liberté : toute initiative individuelle est alors considérée comme une violation de la liberté de l’autre et risque de donner lieu à de multiples inégalités, voire à des privilèges. On exige donc dans une certaine mesure une uniformité qui ne laisse plus à chacun le choix d’être libre. Alexis de Tocqueville soutient cette thèse dans De la démocratie en Amérique en affirmant : « L’égalité produit, en effet, deux tendances : l’une mène directement les hommes à l’indépendance et peut les pousser tout à coup jusqu’à l’anarchie, l’autre les conduit par un chemin plus long, plus secret, mais plus sûr, vers la servitude ». La différence entre les deux peut être considérée comme une menace : l’uniformité tend à devenir la règle et la liberté, par extension, disparaît progressivement. Contrairement à ce phénomène, il existe une passion des libertés qui se détourne des libertés parce que la liberté des uns conduit à l’impossibilité pour les autres de répondre complètement à leurs propres libertés. Par exemple, dans le cas du droit de propriété, interdire la propriété soumet le peuple à une autorité supérieure qui organise l’aspect matériel et limite donc les libertés ; inversement, ne pas limiter la propriété privée peut exposer la société à un phénomène d’accaparement contraire à la nécessité de partage dans la mesure où elle peut impliquer une survie vitale.

     Telle est donc la complexité à laquelle doit faire face aujourd’hui le service public. On pourrait trop souvent penser que l’homme doit être égal à un de ses semblables au sens large, alors qu’en réalité, les hommes ne sont pas nés égaux aux uns et aux autres de par leur nature, mais seulement est égaux en droits. Tel est le sens d’un article de la « Déclaration universelle des droits de l’homme » : « Les hommes naissent libres et égaux en droits ».  La liberté a donc beau avoir pour condition l’existence dans la vie en société, il demeure que la notion de liberté reste présente mais constamment remise en question. Comme le résume fort bien Rousseau dans Du contrat social, la liberté apparaît surtout dans le cadre d’une association, puisque ce sont les autres qui donnent leur pouvoir aux sentiments de liberté. Il faut donc, pour être le plus libre possible, essayer de fonder une association : « Trouver une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui-même et reste aussi libre qu’auparavant. » Tel est le véritable problème qui se pose dans toutes les sociétés : le non respect de cette liberté inhérente à toute personne du fait même qu’il est un homme.

 Conclusion

    L’homme est naturellement libre. Dieu a créé chaque être vivant libre dans sa pensée, libre de faire ses choix, conscient de l’univers dans lequel il vit et plus précisément doué de la capacité d’analyser chaque situation pour vivre et agir suivant sa propre volonté.

     Cependant, l’Homme est trop souvent enfermé dans les étaux de la soumission, de la servitude, trop souvent poussé à agir passivement au lieu de réfléchir et d’utiliser sa propre pensée pour faire ses choix. Son ignorance et sa faiblesse mentale le pousse même dans le fanatisme et le rend victime de machinations dans lesquelles il n’est qu’une marionnette parmi tant d’autres. La soumission au sens commun, l’opinion publique, les évidences collectives jamais interrogées, apparaissent donc comme une grave menace pour la liberté.

     Il apparaît que pour exercer individuellement sa liberté, il faut fonder ensemble un gouvernement qui respecte les libertés de chacun pour vivre dans un monde meilleur, qui accepte chacun tel qu’il est et qui invite constamment à un accord des esprits qui n’est salutaire pour la liberté que s’il n’exclut pas le jugement propre. Mais cette situation est un idéal très difficile à atteindre, car elle est soumise à de multiples tensions et débats qui la rendent quasiment impossible à atteindre. Il est, par extension, nécessaire de se battre pour conquérir sa liberté et pour la conserver.

Justine Dumont TES4, Saint-Marc 2016

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