Mouvements migratoires et occupation de l’espace chez les Lyéla du Burkina Faso

Affronter les dangers du désert vers des cieux d’espérance d’une meilleure vie

1- Des raisons de l’émigration des peuples

    A la lumière des recherches contemporaines et la nouvelle intelligibilité que celles-ci instaurent, Jean-Loup Amselle écrit avec justesse qu’en matière d’anthropologie africaniste, il importe de rompre avec la conception simpliste non-historique des groupes humains africains. L’historicité des peuples africains ne commence guère avec la colonisation de territoires africains par l’homme blanc. Une telle conception s’inscrit naturellement dans le schéma ethnocentriste européen en ce qu’il nie une dynamique originaire, propre aux peuples africains, susceptible de les amener dans le champ d’une historicité originale. C’est en ce sens que cet anthropologue écrit : « Ainsi, la cause paraît entendue actuellement : aucune société n’a jamais vécu à quelque époque que ce soit de façon isolée et repliée sur elle-même. Toutes les sociétés[1] ont toujours été insérées dans des ensembles socio-économiques qui les débordaient largement et qui influaient sur elles.

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LA CONSTITUTION D’UNE SCIENCE DE L’HOMME COMME LA PSYCHOLOGIE

Mystères et méandres du psychisme humain

Introduction : Place de la psychologie parmi les sciences

      La psychologie se situe à mi-chemin entre la biologie et la sociologie. Du moins, Auguste Comte classifiait ainsi les Sciences. Et si la psychologie se trouvait au sommet de l’édifice scientifique du XIXe siècle, c’est en raison de la complexité de son objet. Quoi de plus complexe, en effet, que la pensée ? De plus complexe que les états de l’âme humaine ou les comportements de l’être humain en tant que réseaux de relations ?

    Certes, la psychologie est, en quelque sorte, tributaire de la biologie : l’homme n’est pas un pur esprit et ses états d’âme sont en relation étroite avec ceux de son corps. Mais, dès qu’il s’agit de l’être humain, toute explication purement physiologique devient insuffisante. Car l’homme est aussi un être social et ses tendances, ses sentiments, ses idées se trouvent profondément modifiés par la vie en société. La psychologie est donc aussi tributaire de la sociologie. Se fondant sur ces données, Auguste Comte avait conclu que la psychologie ne jouit d’aucune autonomie propre et que, pour être une science, elle doit se démembrer entre Physiologie et Sociologie. Mais l’homme n’est pas plus un simple reflet de son milieu social que de son organisme. Il est capable de réagir, s’il le veut, de façon personnelle, et c’est pourquoi, la psychologie est devenue aujourd’hui une science indépendante, mais elle suppose toutes les autres.

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Une Synthèse de la Philosophie d’Antoine-Guillaume Amo, philosophe africain des Lumières (Allemagne)

Photo de Hanibal et Images présumées d’Antoine Guillaume Amo

 Nous résumons l’essentiel de sa théorie développée dans la Dissertatio de humana mentis apatheia ; du moins, telle que nous l’avons comprise. Antoine-Guillaume Amo veut montrer les connexions entre le corps et l’esprit ; un problème très discuté, depuis des siècles, par la gente philosophique sans parvenir à s’accorder le moins du monde. L’esprit humain, de par sa nature propre, est impassible ou imperturbable, c’est-à-dire qu’il est indifférent. A l’inverse, le corps, qui est le siège des sensations, est sujet aux mouvements. La motion est, d’ailleurs, une faculté propre à l’organisme vivant, en particulier, le corps. Aussi, l’esprit ne peut subir des passions inhérentes à la matière vivante.

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Préface des Métamorphoses de l’âme -Les différents inconscients jungiens

Par Yves Ardaillon, psychiatre lyonnais

L’étrange monde des profondeurs de notre âme

L’idée fondamentale sur laquelle repose toute l’oeuvre est celle d’inconscient.

Il n’est pas besoin de nos jours de justifier l’hypothèse de l’inconscient. De tels progrès ont été, grâce à elle, accom­plis dans la psychologie que nul ne songerait sérieusement à la mettre en doute. Il n’est plus guère de psychologie qui refuse de l’admettre : trop de faits la justifient. Si l’on ne sait à proprement parler ce qu’est cet inconscient, du moins sait-on qu’il manifeste son existence par des phénomènes qui, sans lui, seraient incompréhensibles. D’ailleurs sait-on ce qu’est vraiment la mémoire autrement que par ses manifes­tations et l’apparition soudaine à notre conscience de souvenirs venus on ne sait d’où ? Il est dans la profondeur de notre être des forces et des activités obscures. Non pas des forces inertes et passives, mais des forces vives et agissantes qui nous font ce que nous sommet, sans que nous puissions connaître directement et clairement leur existence. Elles plongent dans l’obscurité de notre être. Elles touchent son fond biologique, disent les uns, tandis que d’autres les consi­dèrent comme purement psychiques sans qu’il soit encore possible de trancher dans un sens ou dans l’autre. Mais une chose est certaine : elles sont là, ces forces obscures, teintant à tout moment notre comportement, nos réactions, nos idées, parfois accaparant notre être et l’aliénant au monde normal. Le conscient ne serait alors qu’une émergence de ces forces, une clarté partielle dont nous prenons conscience, point lumi­neux au-dessus d’un océan dont on ne perçoit ni la profon­deur ni l’étendue, quoique nous sachions qu’elles existent.

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De la notion de normal et d’anormal en philosophie 

Coalescence du naturel et du culturel

I – La nature comme norme

   A quelles conditions la culture peut-elle être comprise comme une perversion de la nature ? La perversion, le fait de dévoyer sont des termes qui présupposent l’idée d’un droit chemin, d’une rectitude (vivre selon la nature), dont les manifestations culturelles auraient le tort de s’écarter. Ce qui revient à fixer le sens du mot « nature » et à considérer cette notion en tant que norme. Dans ce cadre, la « Nature » figure un tout originel, une dimension de départ : cette notion nous renvoie à un état préalable, rêvé ou réel, du monde.                    

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