De l’expérience de trois années de maturation en Prépa Littéraire Première partie

De l’expérience de trois années de maturation en Prépa Littéraire : Première partie.

De Pauline Khalifa.

I/ Annonce de ton ironique

De nombreux stéréotypes entretenus par des inconnus ou par d’anciens élèves de ce milieu relativement fermé, cultivant un certain mythe social, nous invitent à réfléchir à nouveau aux expériences vécues par les étudiants de Prépa littéraire (A/L). Entre l’exigence intellectuelle des concours de la BEL, comme l’ENS de Lyon ou d’Ulm, demeurant la Tour de Babel d’un symbole de « réussite sociale », et la rigidité personnelle que certains étudiants s’imposent par souci de bien-faire et de perfectionnisme, la Prépa semble mettre en exergue une image anxiogène de son parcours. Si nous nous amusons un instant à énumérer de manière ludique toutes les croyances relatives au Prépa – et la liste n’est pas exhaustive, nous aurions : milieux élitistes, pédanterie gratuite, compétition, dépression et sentiments de culpabilité durant l’inactivité, perte de vie sociale, solitude… Lire la suite

L’organisation du travail agricole chez les Lyéla du Burkina Faso

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Présentation

     Chez les Lyéla, les conditions de vie difficiles génèrent des incidences qu’on peut qualifier, en apparence du moins, d’heureuses : elles obligent à des solidarités également ordinaires, notamment au niveau du travail. En raison des outils du travail dont l’efficacité est grandement limitée, des besoins croissants de chaque famille, du nombre assez élevé des membres d’une cour, la société recourt forcément au principe de solidarité dans le travail qu’elle a érigé au rang d’une règle sociale nécessaire. Celle-ci permet de pallier les insuffisances de la rentabilité individuelle et, du même coup, de créer un tissu de cohésion sociale. En ce sens, il est indéniable que les équipes de travail renforcent et conservent les liens interindividuels même si elles n’évitent pas toujours les rivalités, voire des formes d’hostilité comme, entre autres, les tentatives d’empoisonnement des plus courageux d’entre eux.

1- La division sexuelle du travail : organisation éco-sociale de la famille selon le modèle traditionnel

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     Le partage du gwara, dans le cadre strictement traditionnel, n’est pas aussi rigide qu’une première perception peut le laisser croire. En réalité, lors de nos investigations dans les années 1990, nous avons découvert, contrairement aux analyses de Barral à Tiogo, que la répartition des champs domestiques est nettement plus souple, selon les chefs de famille (kélé k’ébal), les clans ou les villages. Cependant, ce qui est une réalité permanente, c’est que le gwara est attribué par le chef de cour entre les différents hommes mariés. Dans certains cas, qui relèvent de nécessités spécifiques ou de l’éthique des familles, des portions peuvent être accordées aux hommes célibataires ; alors, ils cultivent leur lopin de terre et usent de son fruit selon leur gré. Ils peuvent s’en servir éventuellement pour se procurer une femme en cas de défaillance ou d’incapacité matérielle du chef de l’enceinte familiale. Ce qui est aussi une réalité permanente, c’est le fait que les femmes, en général, n’ont aucune part à ce partage du gwara. On explique cette mise à l’écart par le fait que les épouses aident leur mari. Toutefois, il advient, quand l’espace du gwara est largement suffisant pour les besoins des hommes mariés, qu’on leur en accorde des portions dans la mesure où il s’agit essentiellement de se nourrir.

     Dans leur champ de brousse ou go-kélè, les femmes sèment, outre le mil blanc comme les hommes, l’arachide, des pois de terre, des haricots blancs etc. Elles cultivent leur champ aidées par leurs filles, leurs petits enfants et surtout leurs gendres. Leurs propres fils (les nabia : frères nés du même père et de la même mère), incorporés dans l’activité de l’enceinte familiale, peuvent, sur leur temps de loisir et avec l’autorisation du kélé k’ébal (chef de cour), leur venir également en aide pendant la période des travaux champêtres. On peut comprendre, dès lors, que toute femme, dans ce contexte, désire ardemment avoir un ou des enfants, de préférence des fils. Même si la société fait obligation aux jeunes personnes d’apporter de l’aide aux femmes âgées sans enfants – à condition qu’on ne la considère pas comme douée d’une sorcellerie mortifère qui l’ait inclinée à détruire sa propre progéniture -, il n’y a pas un mouvement spontané qui pousse à cette tâche généreuse.

     L’appel à des équipes masculines ou féminines de travail est une pratique courante chez les Lyéla. Celui-ci s’effectue soit à titre gracieux, soit moyennant finance. Les femmes usent, selon leur gré, du fruit de leurs lopins de terre, à condition que cela ne nuise pas à la subsistance familiale. Elles vendent donc une partie de leurs productions agricoles. Ainsi, l’homme autant que ses enfants issus des différentes épouses, bénéficie indirectement du fruit du travail de ses femmes. C’est à la suite de l’épuisement des greniers de celles-ci que les hommes ouvrent les leurs. Les greniers des femmes doivent d’abord servir à nourrir la famille jusqu’au début des semailles, c’est-à-dire, en mai-juin. Ensuite, ceux des époux sont censés alimenter toute la famille jusqu’aux nouvelles récoltes, en l’occurrence, en octobre-novembre. Dans certains cas, et exceptionnellement, le mari peut aider chacune de ses épouses à cultiver son champ. Toutefois, une telle initiative est plutôt mal vue de la communauté familiale dès lors que chacun a ses occupations spécifiques.

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Frères de clan, frères paternels, frères maternels : la phratrie et les niveaux de fraternité chez les Lyéla du Burkina Faso

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Présentation

D’après la définition de l’”Encyclopédie Universalis”, la pratrie est un “terme qui désigne à l’origine des groupes de parenté (phrater : frère) rassemblant plusieurs familles (au sens large) dans le culte d’un ancêtre commun”, on trouve chez les Lyéla du Burkina faso un mot qui a un sens voisin, en l’occurrence, le Dwi. . Celui-ci désigne, d’abord, le clan ; ensuite, la famille étendue. A ces acceptions, il faut inclure les alliances de différents clans, grâce aux échanges matrimoniaux, et les liens de parenté qui en résultent par la naissance des enfants. Selon le glossaire L’Elé-Français du Père François-Joseph Nicolas, le terme dwi (pluriel dwa) désigne d’abord, « race, clan, famille » (au sens très large). Une telle conception du dwi conduit à une notion de fraternité qui s’étend sur plusieurs niveaux de sens qu’il importera de préciser.

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Etude des formes de la pratique médicinale traditionnelle chez les Lyéla du Burkina Faso

Résumé 

   Les médecins traditionnels lyéla distinguent généralement deux genres de pathologies : les maladies dites naturelles et celles causées par l’action mortifère des membres sorciers des familles. Comme ces maladies ne sont pas de même nature, ils sérient les approches. Les dernières étant d’un genre particulier, elles nécessitent des cérémonies rituelles variées, exigeant même des sacrifices divers et, donc, des soins spécifiques. C’est ce sens que tout soignant est à la fois médecin, devin et prêtre quel que soit le niveau de ses connaissances qui l’autorisent à pratiquer ce type de métier

   Dès lors, les praticiens dits traditionnels doivent tenir compte des phénomènes complexes d’interactions dans les diagnostics et les traitements des pathologies. Traiter celles-ci consiste non seulement à soigner une maladie singulière et localisée dans le corps-peau, mais également à restaurer un état de perturbation vitale chez un malade.


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La femme et les interdits (susulu) des kwala ou clans chez les Lyéla (Burkina Faso)

« Cet ensemble complexe de relations interindividuelles, dans une cour lyel, s’organise autour d’interdits (susulu). Certains d’entre eux débordent le cadre précis de la vie d’une enceinte familiale car ils concernent tous les membres d’un même Kwala et ils sont redoutés par tous en raison de la sanction qu’entraîne leur infraction ; ce qui met toujours en danger la vie des hommes.

Avant d’en analyser quelques-uns, voyons la situation particulière de la femme par rapport à ces susulu. En fait, les Lyéla pensent que la femme n’a pas de susulu au même titre que l’homme. En effet, selon Joseph Bado de Sienkou et les anciens de Goundi dont les dires s’accordent sur ce point, « dans les paroles de n’importe quel kwala, il n’y a pas de traces d’interdits concernant la femme. Ceci résulte de la nature même de celle-ci. En effet, les susulu du Kwala peuvent ôter la vie à un membre masculin du clan tout en préservant celle de la femme par laquelle une faute a été commise. Quand un homme couche avec une femme d’un membre de son Kwala, on ne demande pas de compte à la femme mais à l’homme ». Ainsi, comme elle n’a presque pas de susulu, on croit que le poison ne tue pas facilement une femme.

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