De la « terrorisation » des consciences à la terreur des délinquants burkinabè sur le terrain

  – Enquête anthropologique sur l’origine et le phénomène du terrorisme au Burkina Faso –

Carte du Burkina Faso – Guide du Routard –

Introduction

    Certes, les données des recherches anthropologiques sur les Noirs de l’Afrique soutiennent clairement ceci : face à un danger potentiellement grave, les Noirs se contentent de le regarder au lieu d’agir sur lui pour le combattre et, ainsi, éviter son explosion. Ils n’ont pas de réactivité face à tout danger car ils manquent, de manière générale, de vélocité. L’attente est leur qualité première. Les analyses, ci-dessous, on le verra bien, confirment ce caractère général ou le comportement du Noir.

      Voici plus de quarante ans que je sillonne ce pays pour tâcher de connaître l’essentiel des traditions de ses peuples avant l’effondrement[1]. D’abord, il s’est agi de connaître La Haute Volta, puis le Burkina Faso en m’adonnant à des recherches tous azimuts : en anthropologie culturelle, sociale et quantique essentiellement. Ce terme d’effondrement est réaliste et non pas pessimiste, comme les esprits superficiels auraient tendance à le croire trop vite. Il traduit la perte de mémoire des jeunes générations par rapport à leurs traditions. La majorité de ces jeunes sont issus des villes et des agglomérations ayant une infrastructure citadine. Au contact de ces réalités, ils subissent des changements de comportement visant à vivre comme les citadins qui sont eux-mêmes des déracinés. Dans cette volonté d’imiter la ville comme une forme de civilité, ils prennent nécessairement de la distance par rapport à l’éducation traditionnelle fondée sur l’exigence du respect des règles, des coutumes et sur celle de l’obéissance aux plus aînés. Cette dernière règle de conduite est une manière de cultiver l’humilité et de la reconnaissance du droit des plus âgés dans le code du vivre ensemble tant dans les familles qu’au sein d’un clan, voire de toute communauté plus élargie.

Aussi, si l’on prend le cas de la Province du Sangié, notamment la zone christianisée de Réo et ses environnements, on constate avec effarement à quel point les jeunes qui règnent aujourd’hui sur les clans ignorent les plus élémentaires des lois émanant des kwala (autels du clan chez les Lyéla qu’on appelle à tort gourounsi), les traditions qui fondent leurs soubassements, les coutumes qui régissent l’essentiel des règles d’échanges socio-culturelles, etc. Comme ils ont réussi à éliminer, par les forces de la nuit, leurs aînés, censés mieux connaître les lois fondamentales de leurs kwala, ils sont fort en peine de trouver des gens instruits pour les leur enseigner. Les cultures étant orales, tout ce qui se sait se perd avec le temps. Et l’on ne songe guère à chercher à préserver l’essentiel, par quelque moyen que ce soit. Or, en raison de la terreur qui règne aujourd’hui dans ces villages du Lyolo, c’est ironiquement au nom justement des soi-disant traditions des Lyéla qu’ils ignorent superbement. D’où l’instabilité des générations, la fragilisation à l’extrême des vies humaines minées par le règne des cadets qui exercent un pouvoir sans partage ni sagesse ni retenue dans l’élimination des vies des individus les fragiles : tous ceux qui sont dénués de la double vision des réalités humaines.

     Le phénomène de la décadence va s’accentuer avec l’orpaillage. Dans les zones ou ce genre de recherche d’or est amplifié, il n’y a plus d’ordre qui vaille. Car un grand nombre de jeunes y ont trouvé leur émancipation par rapport aux us et coutumes des anciens. Avec un pouvoir d’achat supérieur à celui de leurs parents et aussi des conditions de vie plus confortables que celles des anciens, ils ont vite fait de tourner le dos à leurs traditions. C’est le règne de l’argent facile, de l’abondance, de la liberté de jouer avec les filles sans le regard inquisiteur des membres de la famille. C’est aussi le règne de la violence gratuite avec la consommation des drogues et des boissons fortes (à Pouni et à Didyr, j’ai des anciens qui se traînent dans les bars et en sortent en titubant). Aussi, l’absence de lois, de règles régissant les comportements comme le respect des autres, ces zones sont devenues, très vite, sans lois ni droits. En fait, ce sont des jungles où les plus forts ou les plus malins triomphent par rapport aux autres. C’est ce que Thomas Hobbes appelle l’état de nature.  Car entre les individus qui coexistent s’établit à partir de cet état primordial d’égalité, qui est l’état même de la nature, un système d’équilibre toujours précaire. Né du désir et de la crainte, de la défiance rationnelle de chacun à l’égard de chacun, cet état, où chacun a un droit légal sur toutes choses, et même sur le corps de l’autre, est un état de guerre strictement conforme, pour chacun, à un calcul correct de ses besoins. Chacun, tout en s’efforçant d’accumuler le plus de puissance possible, demeure pratiquement égal à chacun des autres. Une égale menace réciproque pèse sur tous. État d’équilibre précaire, l’état de nature est un état d’instabilité, d’insécurité et de misère. Il ne comporte ni société, ni agriculture, ni industrie, ni justice, ni injustice, ni lettres ni arts, ni sciences d’aucune sorte. Chacun, en proie à une crainte continuelle et au risque de la mort violente, vit une vie solitaire, misérable, bestiale et brève. D’où la formule célèbre : dans l’état de nature, « l’homme est un loup pour l’homme »[2].

      Au regard de ces mutations psychologiques profondes d’une partie de la jeunesse burkinabè, qui a perdu pied par rapport à la valeur du travail – l’idée de gagner l’argent facile sans efforts pénibles ni travail s’est imposé comme un slogan – et aussi par rapport aux règles de conduite communes, aux lois de la société civile ou de l’Etat, ces faits me sont apparus comme une gangrène qui s’est enracinée dans leur conscience depuis déjà quatre décennies : de Blaise Compaoré à Christian-Roch Kaboré, hormis la Transition de 2015 qui avait failli prendre le problème à bras le corps si elle avait eu le temps nécessaire à cet effet. L’Etat burkinabè n’a pas vu l’émergence de ce phénomène faute d’une pensée rationnelle de l’Etat fondée sur une vision perspectiviste et prospective des réalités humaines. Les divers chefs d’Etat – jusqu’à l’avènement de Monsieur Ibrahim Traoré le 30 septembre 2022 – et leurs gouvernements respectifs ont préféré regarder ce qui se passe sous leurs pieds alors que le pays courrait vers des dangers émanant de sa jeunesse désoeuvrée, mal formée intellectuellement ou mal éduquée moralement, voire mal occupée. Mais tout ceci dérive d’une éducation défectueuse ou malheureuse parce qu’elle est mauvaise, inaboutie, abrutissante.

       Comme le professeur Joseph Ki-Zerbo l’a défendue tout au long de sa vie, l’idée suivant laquelle l’école participe au sous-développement en Afrique noire est tout à fait fondée. Il voit la cause de ce phénomène des temps modernes dans le paradoxe suivant : l’école héritée de la colonisation (je l’appelle « occupation » dans mes écrits) européenne consiste essentiellement à provoquer la rupture des enfants scolarisés des acquis culturels autochtones (langues, traditions et coutumes). En d’autres termes, elle provoque la désintégration du substrat culturel des peuples noirs. C’est comme si on leur coupait le cordon ombilical qui les relie aux réalités du continent ou des peuples africains dont ils sont issus. Aussi, il n’a eu de cesse de militer en faveur de la création, voire de la réinvention d’une autre école, celle du développement de l’Afrique contemporaine. Car il est évident qu’un développement de qualité est lié nécessairement à la qualité de l’école, c’est-à-dire à des formations intellectuelles, générales, technologiques et professionnelles qualifiantes qu’on y enseigne. Cette école de qualité est généralement regardée comme le coeur de tout développement solide, réel et effectif. C’est en ce sens que Joseph Ki-Zerbo considère l’école héritée de la colonisation ou occupation comme un corps transplanté dans l’organisme vivant de l’Afrique noire. On comprend donc que cette école soit considérée comme « une usine à chômeurs et un éteignoir culturel » [KI-Zerbo, Joseph, A quand l’Afrique ?]dans la mesure où, d’une part, « elle ne développe pas la créativité de l’esprit » et, d’autre part, un grand « nombre d’entrepreneurs africains analphabètes sont meilleurs que certains de leurs collègues bardés de diplômes ».

      Dès lors, en Afrique noire, si l’école ne parvient pas à se constituer comme un tremplin pour le développement, pire si « tous les systèmes éducatifs africains sont en crise aiguë », si l’école est à la traîne du progrès économique et social au lieu d’en être la conductrice, c’est parce qu’il y a eu une cassure du système éducatif par « le pacte colonial » qui a fait en sorte que, même sur ce plan, le continent soit maintenu en état de dépendance. Si l’école a pour finalité, comme je le montrerai ultérieurement, d’éclairer les intelligences en les acheminant à la vertu de l’autonomie, le « pacte colonial » a fait perdre à cette institution en Afrique subsaharienne une telle vertu. En outre, remarque Joseph Ki-Zerbo, « c’est cette éducation bancale, myope, qui méprisait et occultait les valeurs » des cultures africaines qui continue d’avoir cours dans les écoles en cette zone de l’Afrique, voire d’en être la référence. Elle a « donné naissance à une école des indépendances africaines rapidement allergique au travail », notamment de qualité où l’on s’engagerait dans une compétition pour la perfection dans une tâche spécifique.

     C’est pourquoi l’éducation n’est plus tout à fait fonctionnelle dans les sociétés traditionnelles ou citadines. Face à ce problème majeur de l’Afrique contemporaine, cet historien ne voit qu’une solution : réinventer une école intégrée dans les cultures africaines traditionnelles et citadines pour permettre à l’Afrique noire, entre autres zones de ce continent, d’envisager sa figure de développement réel et solide. Mieux, il s’agit de former les individus de telle sorte qu’ils atteignent la qualité au niveau du progrès des esprits et/ou des consciences individuelles. En d’autres termes, l’école doit s’imprégner des cultures et valeurs des peuples africains sans pour autant rompre les liens avec l’école européenne. Mieux, il faut une nouvelle éducation fondée sur la formation intellectuelle performante, élevée, ennemie de la facilité et de la médiocrité, sur l’éducation des valeurs morales ; éducation sans laquelle, les jeunes générations n’auraient aucun équilibre de leur personne.

       Pour mettre un terme à cette situation de dépendance préjudiciable au développement de l’Afrique subsaharienne notamment, selon Joseph Ki-Zerbo, il faut donc que l’école de l’Afrique contemporaine fasse sa mue de façon essentielle, c’est-à-dire une transformation radicale. Car il est évident que « les gens qui ont été éduqués par la tradition sont mieux armés pour vivre dans le milieu africain que ceux qui ont été déracinés ». En ce sens, cette éducation, parce qu’elle se fonde de façon optimale sur l’accumulation des connaissances culturelles des peuples africains, constitue la clef du développement de ce continent. A cette fin, il ne faut pas négliger de prendre en compte les langues, les rythmes des peuples africains dont les enfants sont issus, le sport telle que la lutte sous toutes ses formes locales, les danses, etc. Il ne s’agit pas seulement de se contenter de voir à la télévision de tels spectacles culturels ; ce qui est de l’ordre du comportement passif, voire voyeuriste. Toutes ces activités visent à permettre aux enfants d’apprendre à rester en symbiose avec leur fond culturel initial, leur environnement social d’origine, bref leurs cultures respectives. Ainsi réinventée, l’école n’apparaîtra plus comme quelque chose d’extérieur aux sociétés africaines contemporaines, mais comme une appropriation saine, dynamique, voire authentique en ce sens qu’elle devient une nouvelle figure de synthèse accomplie de cultures africaines et occidentales.

       Cependant, on doit prendre garde que cette nouvelle école culturellement intégrée n’induise aucunement un désir de repli identitaire. Bien au contraire, elle doit tendre à augurer la promesse d’une ouverture d’esprit à l’altérité, c’est-à-dire le fait d’acquérir une attitude de bienveillance aux autres, quels qu’ils soient. Car tout développement doit être « le passage de soi à soi-même à un niveau supérieur », selon Joseph Ki-Zerbo, c’est-à-dire à l’universel. Cette exigence d’une école culturellement intégrée ne manque pas d’avoir des applications pratiques dans notre histoire récente. Les exemples les plus éloquents sont celui du Japon et aussi, dans une certaine mesure, celui de la Chine émergente. Nul ne peut douter du caractère culturellement intégré de l’école dans ces deux pays. Et nul ne peut non plus discuter du fait que le Japon soit un pays développé ouvert au monde ; et la Chine, malgré la nature du régime, un pays à l’économie émergente et dynamique, devenue aujourd’hui un partenaire égal des puissances économiques occidentales dans le respect mutuel des échanges à tous les niveaux. Ainsi, en Chine, le système scolaire, bien que culturellement intégré, ne manque pas de réaliser des performances qui sont loin d’être égalées par l’Occident dans certains domaines, tel que celui du textile. Mais, mieux que le textile, à titre d’exemple, c’est l’industrie pharmaceutique chinoise qui traduit toute l’importance d’une école culturellement intégrée. C’est parce que l’école chinoise est intégrée dans la tradition médicinale millénaire chinoise qu’aujourd’hui la médecine chinoise, essentiellement à base de plantes, parvient à se présenter comme une option sérieuse, dans le monde et surtout en Afrique, face à la pharmacie occidentale â base de molécules synthétiques. Ce qui donne raison une fois de plus à Joseph Ki-Zerbo pour qui, « quand on sait d’où l’on vient, on peut mieux bâtir son avenir ».

        Certes, aujourd’hui, il y a partout en Afrique subsaharienne, voire au Burkina Faso même, création d’écoles. Malgré le coût élevé des frais de la scolarité, et en raison de la soif de savoir des Africains contemporains, elles remplissent leurs classes. Mais celles-ci misent sur la formation classique et sur la propagande commerciale. D’une façon générale, les écoles existantes et toujours en création sont soucieuses de rentabilité financière sans aucun soin pour la qualité de l’enseignement ; d’autant plus que les enseignants étant généralement mal payés, négligent le sens de leur devoir. De ce point de vue, l’on n’a guère souci de l’Afrique de demain et des rapports des futurs citoyens avec les autres hommes qui s’y réfugieraient ; tôt ou tard. Pour éclairer davantage la position de Joseph Ki-Zerbo, il convient de méditer sa métaphore de l’arbre : « l’arbre est enraciné, il puise dans les profondeurs de la culture sous-jacente, mais il est ouvert aussi vers des échanges multiformes, il n’est pas emmuré et scellé. Donc, c’est en étant profondément enraciné qu’on est prêt à toutes les ouvertures ».

      Donc, l’éducation – la bonne éducation – manquée est l’une des causes de l’émergence du phénomène des terrorismes dans les pays de l’Afrique de l’Ouest comme le Burkina Faso ; sans doute aussi, ailleurs bientôt si l’on y prend garde. Au Burkina Faso, ces terrorismes ont été nourris par près de trente d’un pouvoir autocratique qui a facilité et encouragé la corruption à tous les niveaux de l’Etat burkinabè.

I- Les dérives du pouvoir autocratique de Blaise Compaoré : la pseudo-rectification

      Dès le départ de leur coup d’Etat, l’ami intime et le frère de Thomas Sankara, en l’occurrence Blaise Compaoré, n’avait jamais partagé l’enthousiasme du cœur du peuple exprimé par Sankara ni non plus ses idéaux majeurs en matière d’économie. Il a toujours fait semblant de faire corps avec Sankara en imitant son exaltation idéologique en faveur des intérêts des peuples burkinabè. Il n’avait nullement la grandeur d’âme de son frère d’armes et de son ami d’enfance. Durant ces belles années de la révolution burkinabè, à travers les reportages, on voit à quel point il faisait figure d’un piètre personnage aux côtés de l’authentique révolutionnaire Thomas Sankara. Blaise Compaoré était, à ce moment-là, et même plus tard, c’est-à-dire jusqu’à ce que les peuples le contraignent à quitter le pouvoir exécutif, a toujours fait preuve de libéralisme capitaliste en matière d’économie. Partager les richesses produites dans son pays avec les peuples de  ce pays n’entrait pas dans ses objectifs. Tout militaire qu’il était (par principe, le militaire doit défendre les intérêts de l’Etat et des peuples de son pays. Hélas, après lui, avec le désaccord des corps de l’Armée du Burkina Faso, on a perdu cette notion de patriotisme ; eux aussi sont devenus comme des civils recherchant leurs intérêts personnels, même à la tête de l’Etat), il ne rêvait que d’une chose : servir ses intérêts personnels et ceux de sa famille et de ses thuriféraires. On sait que, sur le plan économique, ses désaccords avec Thomas Sankara étaient devenus toxiques dans leurs relations publiques, privées ou intimes.

Blaise Compaoré ou celui qui est reconnu comme le valet de l’impérialisme et ennemi des intérêts des peuples de son pays

      Le coup d’Etat mortel contre son ami était attendu depuis un certain temps puisque les acteurs politiques étrangers (La France de Chirac, Félix Houphouët-Boigny, Eyadema et autres tyranneaux africains de cette époque) le poussaient incessamment à passer à l’acte. Certes, ils n’étaient les seuls. Beaucoup de faux amis burkinabè de Thomas Sankara, civils ou militaires, étaient eux-mêmes dans la confidence de l’assassinat imminent de celui-ci. Une fois son coup réussi, on (ses amis de l’intérieur et de l’extérieur) lui suggéra de nommer son initiative : « la rectification » (politique ? économique ?) qu’il n’a jamais su expliquer aux journalistes du monde entier qui affluaient pour enquêter sur les raisons de l’assassinat de Thomas Sankara. Tout semblait indiquer qu’il s’agissait d’une correction économique comme si l’économie est une science exacte à la manière d’une démonstration mathématique qu’on peut corriger. De l’économie, il n’en avait non plus aucune idée. Le terme de « rectification » est demeuré flou jusqu’à ce qu’il change son fusil d’épaule en usant d’autres termes ou justifications aussi oiseux que sa « rectification ».

       En fait, que voulait Blaise Compaoré au juste ? Le pouvoir exécutif pour pouvoir faire tout ce qu’il volait, notamment pour s’enrichir personnellement avec la complicité de ses « amis » qui voulaient, eux aussi, leur part du « gâteau » des richesses produites dans et par ce pays. Puisqu’il savait, au départ, que les peuples ne lui pardonnaient de leur avoir volé leur espoir de liberté et de voie de cheminement vers la souveraineté, l’autonomie politique et économique, il se montra cynique et machiavélique en changeant de perspective politique et économique. Ainsi, sachant bien que sa cote de popularité était infime dans tout le pays, lors de toutes les élections dites démocratiques organisées pendant son long règne d’autocrate, il usa de la méthode dite de la France-Afrique : non seulement il corrompt les potentiels électeurs à coups de francs cfa, mais en outre, il donne des consignes à ces chiens de garde de bourrer les urnes en sa faveur. Ainsi, le 13 novembre 2005, la Commission électorale indépendante (CENI), proclame Blaise Compaoré, président sortant, réélu avec 80,35 % des voix. Dans ce processus fondé sur des mensonges et des trucages éhontés avec la complicité de la majorité de la classe politique, le nombre des votants laissaient à désirer. Ce peut être que 30% de la population qui ont daigné se déplacer pour aller voter. Mais, qu’importe ! Il était élu et c’était cela l’essentiel. A partir du moment où il a réussi, par des astuces peu louables à éliminer un grand nombre de ses complices militaires les plus gênants, en particulier par les armes, il réussit aussi à réduire au silence les partis politiques dits d’opposition, tous aussi veules les uns autant que les autres. Comme les partis politiques ne servent à rien, si ce n’est de prévariquer les biens publics par leur salaire, il réussit à réduire au silence même les plus ardents et les plus apparemment farouches de ses adversaires politiques en les corrompant et en mettant, ainsi, la confusion la plus totale dans leur rang. Ceux qui ont résisté à ses manières machiavéliques par le pouvoir de la corruption, c’est la Presse libre et les journalistes indépendants du Burkina Faso. Ils furent les seuls patriotes de ce pays pendant le long règne de l’autocrate Blaise Compaoré.

     Dans tous les cas, il était fier d’être le superbe valet des puissances étrangères qui le manipulaient à leur guise, du moment qu’il faisait ce qu’elles désiraient. C’était leur garçon de courses. Certes, à l’étranger, il eut une certaine aura par son agitation permanente à s’occuper des affaires de l’Afrique de l’ouest francophone (régler les affaires de prise d’otages français au Mali et au Niger, les conflits au Libéria, etc) comme on le lui ordonnait. Il eut même droit à titre, par complaisance en vertu des bonnes relations entre la France et le Burkina Fas, de Docteur Honoris Causa de l’Université de Lyon III – titre qui lui a été retiré après son procès et sa condamnation au Burkina Faso -. En fait, tout son plaisir consistait dans ses dépenses fastueuses dans les palaces des grandes villes de la France dont Lyon et Paris. Il était toujours en quête d’honorabilité, de prestige comme ce fut le cas de Félix Houphouët-Boigny (son maître) auparavant. Mais celui-ci avait les moyens financiers de ses quêtes d’honorabilité. En revanche, Blaise Compaoré ne se donnait guère autant de peine pour visiter les peuples de son pays en parcourant leurs territoires pour saisir ou pour prendre acte de leurs misères ou de leurs difficultés existentielles. Les peuples le méprisaient, il le sait bien. Mais il n’en avait cure ; l’important à ses yeux était la jouissance absolue du pouvoir exécutif. En ce sens, Blaise Compaoré fut l’un des présidents du Burkina Faso, les plus minables, voire misérables pour avoir été privé du contact avec son peuple à l’instar de Thomas Sankara. Ce dernier était constamment sous la pression ou la vigilance de ses ennemis. Mais il ne dédaignait pas de se frotter, presque charnellement, aux peuples du Burkina Faso.

      En revanche, restant seul à bord de son bateau ou palais, soit le fameux « Kosyam », Blaise Compaoré imposa au pays la devise sous-jacente suivante : « Mangez, remplissez votre ventre autant qu’il est possible par tous les moyens de la corruption et laissez -moi dirigez le pays à ma guise ». D’où les 27 ans de politique corruptrice à tous les niveaux des structures et de l’Administration de l’Etat burkinabè. Alors, la corruption était devenue un art de gouverner un pays dans une pseudo situation d’équilibre, de stabilité et de pseudo-démocratie. Presque tous les milieux d’activité s’étaient pris au jeu de la corruption. L’obtention d’un marché public n’était possible qu’en corrompant gracieusement les fonctionnaires de la haute, de la moyenne et de la petite hiérarchie. Initialement, les étudiants et d’autres jeunes gens ont tenté de résister à ce maëlstrom infernal par des grèves et d’autres formes de résistance au chef de l’Etat et à son système de gouvernement qui était en train de tuer l’âme du pays, de détruire les principes fondamentaux du fonctionnement traditionnel des peuples de ce pays. Mais ils ont fini par céder à force d’épuisement. En accédant à la Fonction Publique, eux aussi sont entrés dans le système de Blaise Compaoré (gouverner par la corruption) en s’en donnant à cœur joie en vue de réussir comme les autres. Que signifie réussir dans ce cas ? Détourner l’argent public initialement destiné aux dépenses publiques pour son propre compte et s’enrichir. Souvent, il s’agissait de paraître en achetant de belles voitures, de belles villas, et la cerise sur le gâteau en ayant de multiples maîtresses pour son contentement. Même si le pays s’enfonçait dans un endettement inquiétant, avec le système de gouvernement de Blaise Compaoré, c’était le temps de l’argent facile qui coulait à flots. Mais au prix de combien de misérables dans le pays ? Personne n’en avait cure ; du moment qu’ils vivaient dans l’opulence, tout va bien dans le meilleur des mondes. Les misérables au bord des routes des villes, ils ne les vouaient même pas. Donc, avec Blaise Compaoré, tous les corps de l’Etat étant corrompus, les secteurs privés l’étaient forcément. A la devise de Thomas Sankara (c’est littéralement le nom du pays) : « le pays des hommes intègres » en l’espace de quatre, le Burkina Faso a rejoint tous les pays africains en devenant (sans changer de nom), lui aussi, « le pays des hommes corrompus » à cause des 27 ans du règne, sans partage, de Blaise Compaoré. C’est pourquoi la corruption s’est immiscée dans les esprits d’où elle serait difficile à extirper.

Blaise Compaoré et Thomas Sankara : amis en apparence, mais ennemis intimes de l’intérieur

II- La tentation des jeunes par des formes de corruption : consta général

       Il existence une persistance du règne du système de gouvernement de Blaise Compaoré au Burkina Faso aujourd’hui encore. Il suffit d’être entrepreneur et de vouloir participer à des travaux de maçonnerie pour comprendre à quel point « le pays des hommes intègres » n’a plus aucun sens maintenant. Ce fut une époque glorieuse de ce pays pendant les quatre ans du pouvoir de Thomas Sankara. Avec la mort de ce beau concept, c’est aussi le quasi anéantissement du patriotisme. Certes, avec les discours de Thomas Sankara qu’un grand nombre de jeunes écoutent constamment au quotidien, on peut penser que les jeunes sont nostalgiques de l’époque de Thomas. Ils le sont en théorie. Ils rêvent quelque chose de grand pour le Burkina Faso comme Sankara l’avait voulu ou rêvé pour eux. Mais dans les faits, on peut émettre de doute sur le fait qu’un certain nombre d’entre eux soit en mesure de s’imposer des sacrifices pour la Patrie comme du temps de Sankara. C’était quelque chose de spartiate que Sankara avait institué tant en matière de morale civile que des valeurs patriotiques : un engagement, un renoncement même pour défendre au prix de sa vie, coûte que coûte la Patrie. Dès lors, ils écoutent abstraitement, aujourd’hui, les valeurs que Sankara propose au pays pour bien le conduire vers un état de bien-être pour les peuples burkinabè.

      Ce qui relève du constat aussi tient au fait qu’auparavant, du temps des Anciens et avec leur éducation fondée sur la morale, soit la période qui va des années 1960 à 1990 environ, on n’aurait jamais pu imaginer l’émergence d’un phénomène social de grande ampleur comme les figures de terrorismes qui gangrènent le pays aujourd’hui. Globalement, l’éducation des peuples de la Haute Volta – Burkina Faso étaient essentiellement fondées sur des valeurs quasi chevaleresques, pour certains peuples ; et pour d’autres, on prônait au plus haut les valeurs du travail. Dès lors que, avec les sols encore riches, la création de vastes ou moyens champs permettait aux familles paysannes de parvenir à l’autosuffisance alimentaire. La richesse de l’élevage permettait aux familles de satisfaire à leurs besoins économiques et financiers et de prendre en charge les frais des alliances matrimoniales et des funérailles. A ce moment-là, l’expression selon laquelle avoir beaucoup d’enfants était un signe de richesse avait bien un sens ; plus aujourd’hui puisque les sols se sont appauvris au point qu’en dépit d’un immense travail on parvient difficilement à nourrir sa famille ; même avec peu d’enfants.

      On arrive à une situation paradoxale : plus les conditions de vie sont très difficiles plus les jeunes aspirent fortement à la facilité. C’est pourquoi, n’ayant plus dans leur conscience ces valeurs chevaleresques d’antan, le remplissement du ventre par tous les moyens devient un impératif catégorique chez eux. J’ai moi-même remarqué sur le terrain (on verra plus loin) en discutant les uns avec les autres que les jeunes gens sont prêts à laisser leur fusil pour suivre des terroristes qui leur proposeraient des armes plus puissantes, plus impressionnantes et un montant d’argent conséquent. Car ils veulent tous rouler en moto de la dernière marque. Dès lors, le concept du patriotisme n’est pas enraciné dans leur tête. Ils pensent, regardent ailleurs. Pour un grand nombre d’entre eux, le patriotisme est un mot creux. Ils n’en ont pas de résonance réelle dans leur personne. Même en son temps, Thomas Sankara avait dû user de slogans pendant les années de sa présidence pour faire entrer le concept de « Patriotisme » dans la tête des peuples de ce pays. Et tout le monde a fini par comprendre le sens de son message de libération du pays par rapport aux puissances étrangères. Et le peuple, dans sa grande majorité, à adhérer à sa mission.

      C’est en ce sens qu’il exact de reconnaître que le Président actuel du Faso, Monsieur Ibrahim Traoré, a hérité d’une situation singulièrement compliquée du fait de la gangrène du terrorisme. En effet, l’inaction des gouvernements successifs burkinabè par rapport à la déliquescence de la moralité et l’absence du sens du devoir dans l’enseignement (du primaire au secondaire) a conduit à la faillite de l’éducation à tous points de vue quant aux comportements antisociaux des jeunes générations. Ces négligences ont abouti aujourd’hui au règne de la facilité dans la volonté de l’enrichissement personnel pour paraître aux yeux du monde ou de ses connaissances, voire à la décadence ou, pire, à la déliquescence des conduites morales. D’où la nécessité, pour sauver le patriotisme, d’une rénovation du système éducatif général : soit de l’école primaire, secondaire jusqu’à l’université dans tout le pays. Pour ce faire, il faut miser l’exemplarité des corps enseignants. Le Rwanda le fait et réussit bien de nos jours. Dans le royaume de Nupé[3], que j’ai cité un exemple d’éducation réussie avant l’arrivée des occupants anglais, la bonne éducation a fait de bons citoyens.

III – L’origine des mouvements djihadistes et terroristes au Sahel

Annexe 5 : La France et ses anciens territoires occupés en Afrique noire. Retour vers le statut d’avant les « indépendances » ? ( p 479)

(In Pierre Bamony : LA RÉALITÉ DÉVOILÉE DES CAUSES DE L’ÉCHEC ECONOMIQUE DES PAYS AFRICAINS – ESSAI DE GÉOPOLITIQUE- (Tome I KDP/Amazon, Mai 2021)

Etudes socio-anthropologiques des causes des djihadismes et terrorismes dans les pays du Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger, etc) avant l’avènement du Capitaine Ibrahim Traoré au Burkina Faso (Extraits)

A- Retour des ex-puissances occupantes des territoires de l’Afrique de l’Ouest

En janvier 2013, la France revint au bercail, mais sans n’en être jamais partie définitivement. La cause et le sens de cette irruption en force de la France dans l’histoire contemporaine de l’Afrique noire francophone s’expliquent par une intervention de ce même pays en Libye. En effet, Nicolas Sarkozy et James Cameron avaient entrepris de jouer aux grandes puissances en Méditerranée en encourageant les mouvements populaires libyens contre leur dirigeant Kadhafi. Quand les événements avaient commencé à dégénérer et pour éviter le massacre des peuples libyens, ils avaient décidé d’éliminer physiquement Mouamar Kadhafi. Mais ils étaient dépourvus des moyens et de logistique militaires pour réaliser leur ambition. Il avait fallu l’intervention de Barack Obama et sa grande armée pour les sortir de ce pétrin. Du moins, c’est ce que celui-ci écrit dans ses mémoires : « Il était évident que Dmitri Medvedev avait de sérieuses réserves concernant une action militaire dirigée par l’Occident pour amener un changement de régime, mais il n’avait pas non plus envie de faire le jeu de Kadhafi… Sans perdre un instant, j’ai appelé Sarkozy et Cameron. Dissimulant à peine leur soulagement devant la perche que je leur tendais et qui allait les sortir du pétrin où ils s’étaient fourrés, ils ont accepté notre solution avec enthousiasme. Quelques jours plus tard, tous les éléments de l’opération étaient en place, les Européens étaient d’accord pour se ranger sous le commandement de l’OTAN et les pays arabes – Jordanie, Qatar, Émirats – étaient assez nombreux dans la coalition pour éviter que cette mission soit perçue comme une nouvelle guerre[4] des puissances occidentales contre le monde arabe.

       Quand le Pentagone a été prêt à recevoir mon ordre de déclencher les frappes aériennes, j’ai publiquement offert une dernière chance à Kadhafi en l’invitant à retirer ses troupes et à respecter le droit du peuple à manifester publiquement. J’espérais qu’il verrait que le monde entier était contre lui, son instinct de survie se réveillerait et qu’il tenterait de négocier sa fuite vers un pays tiers acceptant de l’accueillir, où il pourrait finir ses jours avec les millions en pétrodollars qu’il avait, au fil des ans, envoyés sur divers comptes en Suisse. Mais, manifestement, Kadhafi avait rompu ses derniers liens avec la réalité »[5].

      La destruction du régime de Kadhafi a sonné le glas de l’équilibre et de l’instabilité des pays du Sahel. En effet, tous les groupes islamistes et djihadistes qui circulaient librement ou se faisaient discrets en Libye ont profité du chaos de l’État pour s’emparer des armes sophistiquées que Kadhafi avait achetées aux différentes puissances militaires du monde et les caches avaient été éventrées. Encouragés vivement par des États arabes comme le Qatar qui assura, au début, leur logistique, ces groupes se sont lancés à la conquête des pays du Sahel ; à commencer par le Mali, pays voisin de la Libye, dont l’État était en situation de décomposition avancée. Car le président Amadou Toumani Touré avait été renversé par un coup d’État militaire le 22 mars 2012. L’armée malienne étant en déroute, ces nouveaux conquérants contemporains ne rencontrant aucune résistance militaire devant eux, très vite, ces groupes hétéroclites dont Aqmi, Mujao, Ansar Dine, etc., s’emparèrent de la moitié nord du Mali (l’AZAWAD). Ils imposèrent leur domination sur les populations locales (Touaregs, les Maures, les Arabes, les Peuls, etc.) en appliquant la charia inspirée de l’idéologie d’al-Qaïda. Mais celles qui en souffrirent le plus furent les peuples noirs, supposés premiers habitants de cette région. Très vite, ils interdirent les activités du champ de la culture comme la musique, et même l’usage du tabac, de l’alcool ; enjoignirent aux femmes d’être cloîtrées chez elles ou à demeure chez leur mari. Au regard de leurs traditions morales tirées des principes d’al-Qaïda, un couple d’adultères avait même été lapidé à mort pour donner l’exemple au reste de la population locale quant au respect strict de la nouvelle morale religieuse en vigueur. Des tribunaux improvisés ordonnèrent l’amputation des mains des voleurs. À Tombouctou, ville sainte de l’islam du Moyen-âge, ils détruisirent les lieus saints tels les tombeaux des saints de l’islam local. Ils se livrèrent à des actes de violence inouïs et aveugles avec leurs cortèges de viols des femmes et des filles pubères, des vols des biens des habitants de cette partie du Mali.   

B- La mort programmée par l’Etat français d’un authentique défenseurs des intérêts de l’Afrique noire : Mouamar Kadhafi, guide l’Etat lybien

      Puisque ces groupes djihadistes menaçaient d’envahir la capitale, Bamako, au sud, et d’étendre leurs conquêtes sur les pays côtiers comme la Côte d’Ivoire, et que les armées de ces pays soi-disant indépendants et souverains n’avaient pas pris conscience ni la mesure des dangers qui les menaçaient, soit en raison de l’impuissance des armées des pays du Sahel, soit de la pesanteur de leur passivité courante, l’État français décida[6] d’intervenir militairement pour arrêter la progression des djihadistes vers le sud. Certes, dès les premières heures de l’invasion du Nord du Mali, sentant le danger se dessiner pour toute la région de l’Afrique de l’Ouest, le président ivoirien, M. Alassane Ouattara, alors président en exercice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (la Cédao) espérait qu’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU serait rapidement adoptée afin de donner un mandat pour une éventuelle intervention militaire internationale au Mali. Mieux, à François Hollande qu’il était allé voir à Paris à cet effet, il déclara : « Nous nous retrouverons au niveau des chefs d’État (africains) pour savoir ce que doit être la stratégie militaire[7], mais nous n’excluons pas l’intervention armée ».

     Il avait même insisté sur l’urgence d’une telle opération au Mali : « nous avons demandé un mandat des Nations unies, une résolution, j’espère qu’elle sera votée dans les tout prochains jours afin que nous ayons la couverture nécessaire pour une éventuelle intervention militaire ». Car précisait-il « L’Union africaine, inquiète du développement d’un possible sanctuaire islamiste dans cette région, a apporté son soutien à des négociations visant à former un gouvernement d’unité nationale à Bamako qui permettrait de sortir de la crise »[8]. Mais l’État français n’a pas attendu qu’une telle organisation de l’intervention militaire des pays de l’Afrique de l’Ouest, en raison de la lenteur des prises de décision des chefs d’État africains, soit concluants. D’où la célérité et le sens de l’opération Serval lancée en janvier 2013 ; et ultérieurement remplacée – du moins, dénommée- par l’opération Berkhane. En raison du succès de l’armée française, François Hollande fit une visite officielle à Tombouctou et à Bamako au cours de laquelle il ne put s’empêcher de s’exclamer : « C’est le plus beau jour de ma vie ! », soit l’initiative historique du président français qui a fait réoccuper l’Afrique noire francophone.

        À cette occasion, il fit comprendre aux autorités politiques maliennes que la France restera sur place « le temps qu’il faudra » tant que le « terrorisme n’a pas été vaincu » au mépris de la volonté des élites politiques maliennes et des peuples de ce pays. Il n’en demeure pas moins que les djihadistes ont poursuivi leur extension au Niger, au Burkina Faso, au Tchad, c’est-à-dire dans presque tous les pays du Sahel. Certes, après le mandat de François Hollande, Emmanuel Macron essaie de constituer la coalition d’une armée composée de militaires tchadiens, maliens, burkinabè, nigériens que l’armée française est chargée d’instruire, d’épauler et d’organiser. Mais, c’est une mission laborieuse en raison de la lenteur de réaction des autorités politiques des pays en question ; voire du manque de courage des soldats face aux djihadistes, de la difficulté à mettre en place et organiser un corps d’armée efficace ou qui permette aux soldats de ces divers pays de s’accorder mutuellement pour insuffler plus de dynamisme dans les actions.

   Pendant ce temps, l’État français continue de dépenser chaque mois, chaque année des millions d’euros – c’est l’argent des impôts des contribuables français – pour maintenir son armée sur place en vue de sauver les États du Sahel en raison de la réactivité inefficace des chefs d’État de cette zone de l’Afrique noire. Tel est le sens de cet article du « Canard enchaîné » (mercredi 1er février 2021) intitulé « Des chefs d’État bien tranquilles : « Malgré tous les coups de clairon victorieux après l’élimination d’un bon milieu  de djihadistes, en 2020, la situation au Sahel ne s’est pas améliorée. Et les dirigeants de ces différents pays sous protection française ne se sentent guère ni forcément responsables de ce désordre créé au sein de leur État.

    La corruption règne autour d’eux, y compris au sein de leurs armées, et il n’est pas certain que Macron le leur ait reproché publiquement… De même des exactions commises contre les pollutions civiles par ces mêmes armées, ce qu’un rapport de l’ONU a fait à sa place, heureusement. Autre regret des diplomates et des militaires français ; les chefs d’État du Sahel n’ont pas été mis en demeure de rétablir un tant soit peu l’État de droit dans leur pays. Ceux du Mali et du Burkina Faso caressent sans doute d’autres projets… »

      Tous deux envisagent de mener des négociations avec les djihadistes, sur le thème d’une « réconciliation nationale »[9] souhaitée par une partie de leurs populations, auprès desquelles la cote de popularité de la France et de ses soldats est en forte baisse ». Les djihadistes triomphent au Sahel pour les raisons suivantes : d’abord, le chômage massif des jeunes favorise le recrutement aisé, par la promesse d’argent et d’armes, de soldats parmi eux. Ensuite, les conflits latents entre les groupes de populations aux activités économiques opposées (agriculteurs noirs et pasteurs peuls) font ressurgir des vieilles querelles et des rancoeurs que les lois et les droits imposés par l’État ne parviennent pas toujours à résoudre. Aussi, les uns et les autres recourent à des milices privées – il en est ainsi des chasseurs traditionnels qui peuvent, à l’occasion, prêter main-forte aux uns et aux autres – pour régler réciproquement leurs comptes. Même les individus de moindre importance n’hésitent pas, quand ils sont armés par les djihadistes, à se transformer en terroristes pour divers motifs. Parmi ces raisons, il y a le fait qu’étant armés par les djihadistes, ils sont habilités à manifester leur puissance en vue de s’imposer aux autres membres de leur génération, voire d’accaparer leurs femmes, leurs fiancées, etc., ou razzier leurs biens comme les produits agricoles, les animaux d’élevage. Du moins, c’est ce que j’ai entendu sur place en 2020.

      En effet, dans le cadre de mon projet d’éducation au Burkina Faso, plus précisément à Koman Naponé, village situé à environ 132 kms de Ouagadougou, j’ai dû séjourner en ce pays du 14 mars au 26 novembre 2020 dans l’attente de la réponse imminente d’une banque partenaire. Malheureusement, celle-ci est toujours en attente. Mais jusques à quand ? Pendant ce séjour, je me suis rendu à plusieurs reprises dans l’Est du pays, à la frontière du Niger, soit une zone fortement mitée par des groupuscules djihadistes opposés les uns aux autres, manipulant et malmenant les populations locales. Je voulais comprendre pourquoi les autorités politiques locales restaient passives face aux attaques commises par ces groupes terroristes qui prolifèrent au Nord et à l’Est de ce pays, soit à la limite des frontières avec le Mali et le Niger : l’inertie et l’impuissance. Cet intérêt purement intellectuel – j’ai parcouru cette région pendant de longues années lors de mes recherches en anthropologie – m’a amené à mieux comprendre, avec les instructions et informations de mes amis locaux, le sens de la réflexion de Jean-Claude Cousseran, ancien patron de la DGSE. Celui-ci affirme sans ambages que : « L’Afrique sera notre « Afghanistan » de « proximité »[10] en parlant des prévisions stratégiques de la France. Selon ce dernier, en effet, le Sahel risque de devenir l’Afghanistan potentiel de la France. En effet, après bientôt 10 ans de présence de l’armée française en cette zone de l’Afrique noire, cette réflexion se justifie et se vérifie de plus en plus. Car en Afghanistan, malgré la présence et les combats acharnés durant 20 ans de la plus grande puissance militaire du monde, en l’occurrence les États-Unis d’Amérique, ce pays, victime du pouvoir militaire américain, n’a nullement été vaincu. Pire, cette puissance serait contrainte de se retirer de l’Afghanistan sans avoir obtenu la victoire que les États-Uniens escomptaient contre les Taliban. Car, tout compte fait, ceux-ci vont gagner la guerre parce qu’ils n’avaient pas voulu à la puissance étrangère grâce à leurs réseaux d’informateurs anonymes solides et efficaces : les Khad ou Wad dont il est question dans ces travaux.

      Il se pourrait bien qu’il en soit de même pour la France au Sahel. En effet, j’ai compris par diverses informations sur le terrain que les fameux djihadistes fonctionnent un peu comme les Khad des Taliban en Afghanistan. Partout où ils mettent pied sur un territoire, par exemple dans la région de Fada N’Gourma, ils s’empressent d’infiltrer les populations locales qu’ils terrorisent par leurs armes. Et, ainsi, ils les contraignent aux systèmes d’informations secrètes sur les uns et les autres et sur les mouvements des individus, voire sur leurs entrées et sorties du territoire qu’ils occupent en conquérants. Ils obligent aussi les devins à travailler pour eux. Tout se passe alors comme s’ils avaient des milliers de paires d’yeux et l’adhésion de détenteurs de téléphones portables qui deviennent des informateurs à leur service moyennant des formes de rétributions. C’est pourquoi la présence visible de l’armée française ne pourra rien contre les mouvements terroristes au Sahel, malgré sa puissance militaire impressionnante.

     Pour en venir à bout, deux facteurs importent absolument : d’une part, la surmotivation des gouvernants des États du Sahel pour qu’ils prennent conscience de la gravité de leur situation politique. Et en cas de retrait éventuel de l’armée française, il se pourrait qu’il y ait un risque de délitement de leurs États et de la désagrégation des structures administratives de ceux-ci. Car dans ces pays, toutes les populations n’ont pas encore acquis la notion de l’intérêt public ou du bien commun. Chacune d’elles défend le territoire de sa famille, de son clan, de sa tribu. Qu’importe la déliquescence de l’État dans lequel elles vivent comme si elles étaient à l’étranger. Dans ce cas de figure, la responsabilité de la décadence de l’État est seulement imputable aux gouvernants en activité. Donc, personne n’a cure de sa dislocation potentielle. Ce serait, alors, nécessairement le retour à l’état de nature ou du désordre.

      D’autre part, ces pays du Sahel, malgré l’assistance de la France, ne peuvent vaincre toutes les formes de terrorismes ou djihadismes qu’à une seule condition : utiliser des informateurs locaux pour renseigner les autorités légitimes de leur présence et des troubles qu’ils provoquent sur place afin de les combattre plus efficacement en réunissant les forces du G5 ou celles du Burkina Faso et la puissance militaire française. Ce peut être de jeunes gens ou de jeunes filles qui seraient alléchés par le pouvoir de l’argent ou des armes, à l’instar des méthodes des djihadistes eux-mêmes. Dès lors qu’ils seraient rémunérés, ils auraient le sentiment d’être puissants et supérieurs aux autres. Thomas Sankara et ses CDR (Comité de Défense de la Révolution) s’étaient fondés sur de telles méthodes pour venir à bout de la corruption, des vols, des pillages et autres formes de délinquance dans son pays. Autrement, tout le monde le sait bien : même les armées locales (États du Sahel) sont impuissantes à contenir et à maîtriser de tels mouvements terroristes. Car tout le monde peut devenir terroriste du jour au lendemain, si on lui en donne les moyens. Ce ne serait pas une question de foi religieuse, mais d’intérêt matériel. En ce sens, l’armée française risque de s’enraciner dans un bourbier, dépenser en vain l’argent des contribuables français. Car l’Afrique noire donne à voir un double visage de soi aux gens, qu’ils la connaissent bien ou mal : la partie visible qui séduit par l’amitié des populations, leur affable spontanéité ; et la partie invisible, opaque où gît la réalité complexe des phénomènes, voire terrifiante, en apparence inintelligible, inaccessible au pouvoir de compréhension de la raison commune. D’où la nécessité pour la France – si elle veut éviter le risque d’un embourbement durable – et les pouvoirs politiques locaux d’une intime collaboration de confiance, d’égalité de traitement en matière de partenariat dans cette zone de sa sphère d’influence politico-économique. Car sans elle désormais, il se pourrait bien que les États du Sahel retournent à l’état initial de territoires morcelés et gouvernés par des entités ethniques. Or tout se passe comme si les chefs de ces États n’ont pas encore réellement conscience de ce risque puisqu’ils proposent de traiter avec les groupuscules djihadistes qui ne souhaitent, pourtant, qu’une seule chose : le délitement des États pour s’installer à la place des gouvernants et diriger les affaires de leurs territoires conquis avec terreur et effroi, à l’instar des Taliban avant l’intervention états-unienne en 2001.

      Donc, au risque de me répéter sur ce point, tout ceci crée une situation de confusion profonde que l’armée française, malgré sa puissance militaire, ne pourrait résoudre quelque jour prochain ; même si, comme le remarque Le Canard enchaîné, « Le ciel du Sahel est vraiment devenu très français » (mercredi 3 mars 2021). Qu’on en juge par le compte qu’il donne de la puissance aérienne française sous ces cieux : « En 2020, les sept Mirages 2000 basés à N’Djamena, la capitale du Tchad, ont accompli en moyenne quatre « sorties » par jour, soit 20% de plus que l’année précédente. Et ces avions, les plus modernes avant l’entrée en service des Rafales (ailleurs qu’au Sahel), ont balancé l’an dernier 206 missiles ou bombes sur la tête des djihadistes, soit 150% de plus qu’en 2019. Des «frappes de haute précision », jure l’état-major. Même activité en hausse des avions ravitailleurs en vol, qui évitent aux Mirages de frôler la panne sèche.

    Autres actions menées depuis le ciel : celles des trois drones Reaper, basés à Niamey, la capitale du Niger. En 2020, ces avions sans pilote ont effectué 590 opérations de renseignement ou de bombardements, et tiré 246 roquettes et missiles tactiques, soit 196% de plus qu’en 2019.

      Si l’on ajoute la présence d’autres appareils français – un avion de guerre électronique, des avions légers de surveillance, des avions de transport C-130 et A400M… ». Au regard de toutes données présentes, il est permis de supputer qu’à défaut de savoir précisément les raisons d’État pour lesquelles la France occupe militairement le Sahel, avec l’accord des élites politiques des pays du Sahel, à tout le moins, il est manifeste qu’elle y a trouvé un vaste espace d’entraînement militaire en vue de se préparer le mieux possible aux guerres de demain devant se dérouler sur un vaste territoire comme le Sahel. Autrement, tous ces avions dans les cieux des pays du Sahel constituent, en somme, une vaste démonstration de force militaire. Mais en réalité, elles sont vaines puisqu’elles ne sont de nature à opérer efficacement sur le terrain (le sol) où se meuvent les terrorismes et autre groupes djihadistes.

     Car il y a eu beaucoup de spéculations sur les raisons cachées de la défense des intérêts de l’État français dans ces opérations militaires au Sahel. Il est certain que ce n’est pas pour les beaux yeux des Maliens qu’il a consenti à dépenser tant de millions d’euros de l’argent des contribuables français sans avoir leur accord ni même celui des représentants du peuple à l’Assemblée nationale. Pour certains journalistes, il s’agit de protéger les ressources du sous-sol de ces pays dont l’économie et l’industrie françaises ont besoin aujourd’hui et demain. À titre d’exemple : le sous-sol malien contient de l’or dont sept mines en activité qui auraient pu tomber entre les mains des djihadistes ; et situées à la frontière du Sénégal. C’est le troisième producteur africain après l’Afrique du Sud et le Ghana. Il contient aussi des gisements de minerais de fer, de bauxite, de phosphates, de marbre, de l’uranium ; et même des réserves considérables de pétrole situées dans la zone à cheval sur la Mauritanie, l’Algérie et le Mali. On trouve presque autant de ressources minières, hormis le pétrole et l’uranium, au Burkina Faso. Quant au Niger, outre son pétrole, on sait l’importance de ce pays pour la France, c’est-à-dire son énergie nucléaire en l’occurrence, l’uranium nigérien qu’Areva (autrefois Framatome) exploite dans des conditions mortelles pour les ouvriers, les mineurs et même pour les populations voisines des mines depuis plus de quarante ans. Donc, selon les tenants de telles thèses, l’État français n’est pas intervenu au Mali en vain, mais essentiellement pour sauver des États du Sahel en faillite qu’il faut préserver pour défendre les intérêts français aujourd’hui et demain. Car la conscience de l’État français a toujours une longueur d’avance sur celle des chefs d’État des pays de l’Afrique noire francophones qui semblent toujours endormis dans leur palais. Leurs pays seraient volés, leurs frères, à l’avenir, réduits de nouveau en esclavage par les autres peuples qu’ils ne s’en rendraient pas même pas compte. Ceci est un réel drame pour les peuples de l’Afrique noire dans leur ensemble en raison de l’absence de conscience effective des élites politiques et économiques de leurs pays respectifs à défendre les intérêts vitaux du continent africain.

Enquête sur des terrains au Burkina Faso

A- Retour à Kantchari (septembre 2022)

     Comme je l’ai dit ci-dessus, j’ai eu l’occasion de repartir en dans l’Est du pays que je connais relativement bien. Mon ami informateur ou, plutôt, professeur des savoirs ésotériques et des pratiques médicales traditionnels m’avait reçu chez lui à plusieurs reprises. Changeons son nom : Lankoandé. J’étais curieux de comprendre comment les peuples gourmantchés peuvent prétendre qu’ils disposent de grands savoirs et de grands pouvoirs face à diverses situation scabreuses, comme le terrorisme, alors qu’ils se montrent incapables de combattre efficacement ce phénomène qui se passe au quotidien sous leurs yeux. J’ai compris au moins de faits. D’une part, les supposées sciences de guerre ou de défense de ces peuples sont inopérantes face aux armes de l’homme blanc. Elles n’ont qu’un but précis : se donner une cible à détruire ou a empoisonner. Quand une cible est plus élargie et mobile comme les terroristes, ils ne peuvent rien. Bien au contraire, ils fuient devant l’ennemi lourdement armé à l’instar de l’armée malienne qui fut mise en débandade à l’approche des djihadistes du Nord.

  Ensuite, les fameux terroristes qui se promènent librement à Kantchari, à Diapaga, etc., sont généralement leurs propres frères qui ont été armés et financés pour semer la terreur parmi la population. Disposant d’armes, ils deviennent puissants et imposent leurs droits aux autres. Ils n’hésitent pas à piller les biens des uns et des autres, à voler les filles et les jeunes femmes des uns et des autres, voire à les violer. Puisque Lankoandé est un grand travailleur, il dispose de suffisamment de ressources matérielles. Il sait que ses « frères » terroristes le font surveiller par la compromission de ses voisins. Comme il me l’a expliqué : « si je m’avise de partir de chez moi un jour, mes voisins le sauront immédiatement. Ils informeront les porteurs d’armes qui viendraient piller ma maison, prendre ma femme et emporter le contenu de mes greniers. C’est pourquoi je ne peux pas venir te voir à Ouaga. Je suis condamné à rester chez moi pour protéger ma famille et mes biens jusqu’à ce que les choses se calment… Quant aux terroristes, on se connaît tous. Ils ont installé leurs camps dans le Parc W et viennent se ravitailler à Diapaga. Personne n’ose les attaquer ni les chasser. Avec quelles armes le ferons-nous ? C’est à cause de leurs armes qu’ils font leur malin ici ».

B – Kyon dans la Province du Sanguié

     Il s’agit de la situation des jeunes volontaires de la défense de la Patrie. Elle semble difficile et ils n’ont pas tout à fait l’audace de s’affronter aux terroristes en cas d’attaque en raison de l’inégal équipement militaire des uns (les VDP) et des autres (les terroristes). Certains jours, sur la route de Ténado-Kyon, ils tentent de contrôler des voyageurs à la recherche de possibles terroristes. A cet effet, ils prennent soin de se cacher derrière des bosquets pour observer les passants. Selon le comportement des voyageurs, ils peuvent cacher leur fusil pour éviter de montrer leur statut. Ils évitent, ainsi, de faire front à un possible terroriste généralement mieux armé qu’eux-mêmes. Les locaux, qui les connaissent bien, les décrivent comme des couards, plutôt malheureux, c’est-à-dire démunis de tout dont les moyens financiers et matériels pour vivre. Parfois, comme à Ténado, du moins selon les témoignages des uns et des autres, certains VDP ne prennent pas bien au sérieux leur mission locale. Il y en a qui sont enclins à l’alcoolisme au point de boire et de se trainer sur la place publique au risque de se déshonorer.

   Puisqu’ils sont dans une situation d’instabilité, d’insécurité et de manque d’assurance dans leur mission, il conviendrait (simple proposition) d’envoyer un encadreur dans chaque localité pour les soumettre à une activité sportive permanente comme Thomas Sankara l’avait instauré pour toute la population burkinabè (les jeunes autant que les adultes). S’agissant des peuples du Sanguié, au regard de leur tempérament allergique à toute figure de hiérarchie, il conviendrait d’envoyer des encadreurs originaires d’autres régions ou d’autres peuples. Autrement, les individus ne respecteraient pas les ordres de l’un des leurs. Ces encadreurs pourraient impliquer chacun des VDP dans le système de collecte de renseignement sur les sympathisants ou le complices des terroristes ou sur les terroristes eux-mêmes. Dans ce cas, ils devraient parler à chacun d’eux à part afin d’éviter la circulation des informations entre eux. Il faut donner à une telle mission le caractère de la confidence absolue pour plus d’efficacité. Car si personne ne sait ce que fait l’autre, le soupçon à l’égard des uns et des autres pourrait avoir une efficacité dans chaque groupe.

     Par ailleurs, il faut imposer la nécessité d’une remobilisation générale constante, avec beaucoup d’énergie, pour maintenir en éveil l’intérêt des VDP sur le terrain afin qu’ils n’aient pas le sentiment de l’abandon. Ils ont besoin de sentir utiles dans leur mission, d’avoir le sentiment que l’Etat s’intéresse à eux, en particulier et qu’ils comptent aux yeux de tous. En étant motivés en permanence, ils seraient davantage motivés et même prêts à accepter facilement le système d’espionnage interne et externe, c’est-à-dire au niveau du village et de ses environs. C’est le développement du renseignement qui permettrait d’éradiquer les tentations du terrorisme au niveau local et individuel. Si les jeunes, qui sont tentés par le terrorisme pour des avantages matériels et non pas idéologiques comme les djihadistes, se sentent traqués en permanence, ils fuiraient leur village ou renonceraient à passer à l’acte. De cette manière, le terrorisme qui est encore au niveau psychologique, pourrait être combattu ; il pourrait en être extirper pour de bon.

C- Le cas de Dassa dans la Province su Sanguié : commune mise en accusation pour complicité flagrante avec les terroristes

    Dassa souffre de 3 maux ou de 3 manquements aux règles traditionnelles de la veille sur la sécurité de la population d’une localité.

    D’abord, pour une majeure partie de la population du Lyolo, les gens de Dassa sont eux-mêmes responsables de leurs misères aujourd’hui. Initialement, une partie de la population a été complaisante et complice des jeunes gens qui se sont organisés en terroristes et qui ont installé leurs camps dans des zones forestières ou, plutôt, arborées voisines – il s’agit, plutôt, de zones boisées relativement denses par endroit qui servent d’abris aux groupes terroristes. Car la forêt classée de Tiogo ne s’étend pas jusqu’à Dasssa -. Ces terroristes ont réussi à recruter des jeunes gens du village comme des indics ou des informateurs. Ils étaient fiers de faire ce travail d’espionnage au détriment des intérêts de leur localité et au mépris des lois traditionnelles qui interdisent de tels comportements. Progressivement, des commerçants sont devenus leurs complices en leur fournissant tout ce qui était nécessaire pour satisfaire leurs besoins. Du moment qu’ils ne s’en prenaient pas aux populations villageoises et aux biens des gens, tout le monde faisait semblant de tolérer leur présence à proximité de Dassa. Pire, les autorités politiques traditionnelles (chef de terre, chefs de kwala, chef du village, etc) ne réagissaient nullement face à ce danger potentiel. Ils semblaient s’en accommoder puisqu’ils ne signalaient pas leur présence auprès des autorité de l’Etat à Réo.

   Ensuite, quand il s’est agi de recruter de jeunes volontaires pour la défense de la Patrie, il y en a eu très peu qui se sont engagés : tout au plus 25 volontaires pour une commune qui compte, selon les informations des uns et des autres, 25 villages. Ils prétendaient qu’il appartient à l’Etat de les défendre en cas de danger ; ou de menaces terroristes, alors qu’ils vivent avec des terroristes et dont une partie de la jeunesse est, elle-même, terroriste. Tout se passe comme s’ils raisonnaient ainsi : « il y a des militaires dans ce pays. A quoi servent-ils s’ils sont incapables de défendre la population contre les menaces terroristes ? » Ce quoi ce type de raisonnement ne répond pas tient au fait suivant : les militaires sont issus de familles qui risquent leur vie pour défendre celles des peuples du Burkina Faso dont fait partie la population de Dassa, apparemment dénuée de la conscience civile patriotique et citoyenne.

    En dépit du nombre restreint de VDP de Dassa, néanmoins il y a eu un retour de bâton contre la population de cette commune ou une partie de celle-ci. Se fondant sur le prétexte que les gens de Dassa les ont trahis, un contingent est venu du côté de Tiogo, selon les témoignages de ceux qui les bien vus lors de leur passage à pied dans cette localité. Ce fut le cas gens de Pô. Un matin (aucune date ne m’a été donnée par mes informateurs), alors les jardiniers étaient en train d’arroser leurs légumes, ils ont vu un groupe de terroristes à pied et très bien armé. Cette subite apparition causa une frayeur terrible parmi la population. Tout le monde s’apprêtait à fuir pour sauver sa peau. Mais leur chef les a vite rassurés en affirmant qu’ils n’avaient pas à affaire à la population de Pô, mais aux gens de Dassa qui les ont trahis en permettant à leurs enfants de s’engager du côté de l’Etat contre leur lutte et leurs intérêts. Parmi ces terroristes qui ont traversé un bout du Lyolo à pied figurerait une jeune femme qui ferait office du chef du groupe. Il semblerait qu’elle serait insaisissable ou qu’elle aurait le don d’ubiquité. Serait-ce une légende au sujet de ses prétendus pouvoirs ésotériques ? Il m’a été difficile de vérifier ces affirmations.

   Tout compte, les terroristes ont décidé de régler leur compte à la population de Dassa en tuant même un certain nombre d’entre eux dont des informateurs qui représentaient une menace pour leur sécurité ou pour la possible découverte de leurs cachettes dans le bois. Ils ont détruit leurs biens en brûlant les greniers et en emportant tout ce qu’ils pouvaient comme aliments ou animaux. Même les commerçants complices n’ont pas été épargnés. D’où la débandade de la population locale en péril. Toutefois, selon divers témoignages, ce n’est pas tout Dassa qui a été attaqué et qui a été poussé à la désertion du village, mais certaines localités. En revanche, d’autres localités n’ont pas été du tout inquiétées et qui continuent à vivre paisiblement dans leurs villages. Pourquoi ? On sait, depuis un certain temps, que les terroristes se sont mêlés tellement à la population qu’il devient difficile de distinguer qui est terroriste ou qui est complice des terroristes et qui ne l’est pas.

     Des informateurs expliquent, ainsi, l’origine du terrorisme et son implantation dans Dassa. Pendant longtemps, l’environnement de Dassa était propice à l’orpaillage. Le sol était riche et l’on pouvait vivre agréablement du produit de l’orpaillage. C’est ce qui a permis aux jeunes gens du village de bâtir de coquettes maisons, de s’acheter des motos puissantes et belles. Mais, avec l’épuisement des filons, très vite le chômage s’est installé. Puisque les terroristes sont toujours riches (d’où leur vient leur argent, leur fortune ?), les chômeurs, anciens orpailleurs, n’ont pas hésité à rejoindre les rangs des méchants, des « ennemis » de l’Etat. D’autant plus que, selon l’un de leur complice appréhendé par l’armée, les terroristes proposent, pour toute adhésion, une somme de cinq millions en liquide ; plus 20000 francs par jour que l’on ait travaillé ou non. Et quel genre de travail ? Selon les mêmes informations un ou des fétichesurs locaux les aident à se faufiler dans les immenses grottes des collines. Leurs caches sont aussi facilitées par la proximité des forêts le long du Mouhoun. C’est en ce sens que je me permets de parler, dès le départ, de délinquants devenus terroristes sans but précis, sans idéologie ni principes politiques clairs. Ils ne seraient même pas capables d’expliquer pourquoi ils ont pris les armes contre l’Etat, hormis le fait qu’il y a un grave problème du chômage des jeunes dans le pays. Même sur ce point, l’argument du chômage ne vaut rien : c’est dans tous les pays africains que le chômage massif des jeunes se pose aux Etats. Il n’y a pas, pour autant, un problème de terrorisme, mais de chômeurs devenus, par la force des choses des délinquants. Il faut poser l’hypothèse suivante : l’orpaillage sauvage au Burkina Faso, depuis des décennies, sans contrôle ni réglementation juridiques ne fait-il pas le lit des terrorismes ? N’est-il pas la cause principale ou l’une des raisons majeures du phénomène du terrorisme au Burkina Faso ? A défaut de l’affirmer, une telle question mérite d’être posée.

D- Du djihadisme rampant depuis des décennies (2012) dans la zone du Sud – Ouest à l’exercice de la terreur sur les populations locales majoritairement complices des djihadismes : des aveux d’une ancienne professeure d’un établissement scolaire privé à Sideradougou (Koudougou 5 mars 2023).

   En raison de mes recherches sur des terrains où prolifèrent des figures diverses et variées de terrorismes, j’ai été initialement conduit à soutenir que le djihadisme est un épiphénomène au Burkina Faso. Ma rencontre récente avec une jeune femme et les aveux de celle-ci, qui travaille désormais à Koudougou, m’a amené à penser autrement les réalités de ce pays. En effet, au cours de l’année scolaire 2021-2022, Germaine Coulibaly (il s’agit d’un nom d’emprunt pour la protéger) a été recrutée et affectée dans un collège à Sideradougou. Elle ignorait où l’envoyait. Puisqu’elle désirait ardemment travailler, elle n’avait pas eu le choix de refuser ce poste ou de demander une autre localité.

     Selon cette jeune femme, avant même son arrivée, l’on savait qui venait pour occuper ce poste dans ce collège privé. Très vite, elle se rendit compte que les administrations d’Etat avaient disparu et le personnel avait fui les lieux. Au départ, elle comprit que toute la région était entièrement occupée par des djihadistes, et se sentant constamment sous surveillance, elle tomba malade à plusieurs reprises au point de dépérir de manière inquiétante en raison de ses angoisses légitimes et de la menace de la situation générale sur la psychologie des gens. Elle finit par réagir positivement afin d’assumer cette situation difficile en tâchant de terminer l’année scolaire. De toute façon, elle ne pouvait pas partir des lieux sans étudier les moyens possibles d’une fuite sans éveiller les soupçons ; ce qu’elle fit un jour avec mille précautions. Au cours de l’année scolaire, elle fut approchée plusieurs fois par les djihadistes qui lui ont proposé d’adhérer à leur mouvement politico-religieux, moyennant le gain d’une somme importante d’argent (un million de francs cfa ?). En revanche, elle épouserait l’un d’entre eux. Celui qui lui a fait cette proposition, du type peul, lui avait fait comprendre que l’un de ses frères, qui a réussi sa vie dans les affaires au Ghana, lui envoie régulièrement beaucoup d’argent. Toutefois, elle voyait que certains d’entre eux, même avec leurs poches pleines d’argent liquide, sont des misérables ambulants. Car très souvent, ils n’ont rien à manger durant leurs nombreux déplacements entre la Côte d’Ivoire et la région de Banfora. Leur base, c’est Doutié. Mais ils se déplacent en permanence sur la ligne Mongodara – ? (Impossible d’avoir des données précises sur les zones géographiques du Burkina Faso, faute d’auteurs burkinabè pour remplir les données géographiques du pays) – Banfora. Ils sont présents à Sideradougou, mais aussi à Nounoutchiédougou, voire Banfora même. Aujourd’hui, les anciens de ces localités font souvent cette remarque : « On les a vus venir (initialement, ils sont étrangers à ces villages) ; mais on n’a rien fait. Maintenant, on ne peut plus rien faire pour les chasser de chez nous ».

   Selon cette jeune femme, qui a vécu au milieu d’eux pendant une année scolaire, ces djihadistes sont bien organisés pour les raisons suivantes. D’une part, ils veulent détruire l’Etat burkinabè pour instaurer leur propre régime politico-religieux. A cet effet, l’Islam deviendrait la religion d’Etat. Déjà, dans les zones qu’ils contrôlent d’une main de fer, sans pour autant interdire la pratique des autres religions, comme le christianisme, les filles et les femmes doivent avoir une tenue correcte et porter forcément le voile. Ils délèguent certains d’entre eux pour se tenir devant les églises chrétiennes le dimanche afin de contrôler le respect de leurs consignes (lois islamiques ?)

     D’autre part, dans toutes les zones qu’ils contrôlent, tout le monde, notamment les commerçants, qui en tirent grandement profit et les infirmiers, qui les soignent, qui n’ont pas désiré s’enfuir, doivent collaborer avec eux. Tout le monde se connaît mais personne ne dit mot. Aussi, lorsque les autorités de l’Etat passent dans cette région ou dans ces localités minées par la présence des djihadistes, ils se mêlent à la population qui est elle-même complice de cet état de fait. C’est pourquoi toute lutte frontale avec eux serait inefficace ; à moins que, comme le suggère la jeune femme, on ne bombarde toutes les localités occupées pour semer la terreur et contraindre, ainsi, les populations locales à dénoncer les terroristes et à favoriser le retour des administrations étatiques sur place. Leur discrétion et leur présence sont telles qu’ils imposent que les véhicules des transports en commun ne circulent que la nuit, soit à partir de 22H. Il est vrai, dit-elle, qu’en traversant les forêts ou zones boisées, leur présence est sensible. Certains d’entre ces djihadistes sont dans la région depuis 2012. Autant dire qu’ils se meuvent sur place comme des poissons dans l’eau ; même du temps de Blaise Compaoré qui, par des mensonges d’Etat, avait soutenu qu’il n’y avait pas de terroristes – djihadistes au Burkina Faso.

   Enfin, ils n’ont pas les mêmes méthodes que les terroristes qui n’hésitent pas à tuer, violer, à détruire les biens des populations locales pour manifester leur puissance. Les djihadistes respectent les femmes, les jeunes filles célibataires, à condition de respecter leurs consignes de tenues vestimentaires ad hoc. Leurs représailles sont dirigées contre les localités où ils soupçonnent la présence de VDP qui sont leurs ennemis en tant que défenseurs de la Patrie qu’ils voudraient, au contraire, détruire. En outre, ils ne saccagent pas les écoles. Les écoles publiques sont fermées parce que le personnel a dû fuir la région de Banfora pour éviter de collaborer avec les djihadistes. Ils ne s’en prennent pas aux écoles privées puisqu’ils désirent que leurs propres enfants soient bien scolarisés. Mais à une condition : ils suppriment les parties des programmes scolaires qui ne leur conviennent pas ; ou qui disconviennent à leurs principes, à leurs dogmes religieux. Ils les remplacent par tout ce qu’ils veulent, soit tout ce qui est en accord avec l’enseignement de l’Islam.

   Tout compte fait, la situation du Burkina Faso, sur le plan des terroristes et du djihadisme est une affaire scabreuse pour le jeune président Ibrahim Traoré. Il faudrait que le pays sache raison garder en lui laissant le temps nécessaire pour en finir avec la lutte, la guerre contre toutes les formes de déviance par rapport à l’intégrité de l’Etat burkinabè. Car s’il n’y a plus d’Etat, il n’y aurait plus de vie politique, d’Institutions politiques, de partis politiques, etc.

Conclusion : des pistes de conseils en guise de propositions comme stratégies de la lutte contre le terrorisme au Burkina Faso

  Pour éradiquer les formes de terrorismes ou djihadismes au Burkina Faso, il faut mettre en œuvre les moyens suivants :

1) L’infiltration des divers groupes soit par de pseudo-engagés soit par des membres de ces groupes que l’Etat aurait retournés en sa faveur, mais aussi tous les renseignements possibles ;

2) Assécher leurs sources de financements internes ou externes ;

3) Les affamer par tous les moyens en faisant un blocage strict en face de leurs zones de cachettes. Ce ne serait pas difficile à organiser puisque tout le monde le sait ; ou presque tous les locaux.

      Les zones du Burkina Faso, on le sait, les plus gangrénées par les figures du terrorisme sont les suivantes ; la région du Mouhon, celle de l’Est (les frontières du Togo et du Benin), du Nord, soit aux frontières du Mali et du Niger avec le Burkina Faso, la région de Solenzo désormais libérée, des zones de la région de Banfora (djihadismes), etc. Auparavant, c’est-à-dire il y a quelques cinq mois, j’avais suggéré d’étendre une barrière de fils de fer barbelés entre la frontière du Mali et du Burkina Faso pour empêcher à l’avenir les incursions des frontières du Mali au Burkina Faso. Mais une telle suggestion n’est plus d’actualité en raison des bons rapports diplomatiques entre les deux pays qui semblent cheminer vers la mutualisation de leurs moyens d’intervention militaire, ou non, contre le terrorisme ou le djihadisme. En revanche, une telle éventualité pourrait tout à fait se concevoir entre le Benin ou le Togo et le Burkina Faso, notamment le long du Parc W. Car il y va, dans ce cas de figure, de l’intérêt majeur de chaque pays. A défaut d’une collaboration qui serait nécessairement efficace pour traquer les groupes terroristes d’un côté et de l’autre des frontières de chaque pays, une autoprotection s’impose, y compris par l’installation des fils de fer barbelés le long des frontières du Burkina Faso.

    Il importe de commander à l’Iran ou à la Turquie quelques drones tueurs ; puisque certains pays occidentaux ne veulent pas vendre leurs armes aux Africains, en particulier les pays de la zone francophone. Ou alors le prix de leurs armes est injustement exorbitant et, donc, dissuasif pour les pays pauvres. Il serait alors aisé de demander aux spécialistes des drones de ces pays de venir former des Burkinabè au pilotage de drones ; ce qui pourrait durer tout au plus deux à trois mois. Disposant de telles armes d’une grande efficacité, confiées à des Burkinabè sûrs, l’Etat pourrait les stationner en bordure des forêts susceptibles d’être des repaires de terroristes. Ce peut être à Ténado pour surveiller les Forêts de Kalyo, de Tiogo jusque dans les zones de Dassa. Puis à Kantchari pour surveiller le Parc W. Il s’agira de trouver de tels lieux appropriés pour la surveillance des zones de tout le Nord allant de la frontière du Mali à celle du Niger.

   Toutefois, une telle sécurisation du territoire n’est pas encore totale sans l’implication des populations locales elles-mêmes. Le chef de l’Etat a déjà fait le nécessaire à cet effet. Mais ses efforts doivent être permanents pour les tenir en éveil. Autrement, la négligence risquerait vite de s’installer. Il peut compter sur des chefs traditionnels patriotes, c’est-à-dire peu sensible aux phénomènes de corruption. Cette vigilance doit même être citoyenne, c’est-à-dire l’affaire de tous les Burkinabè s’agissant de la corruption des fonctionnaires ou des militaires dans tout le pays. Car les 27 ans de présidence de Blaise Compaoré ont fait d’énormes dégâts dans les consciences. C’est pourquoi le combat du jeune Président Ibrahim Traoré est un engagement de longue haleine pour venir à bout de cette gangrène qui tue l’esprit patriote. Car la tendance à la corruption à tous les niveaux de l’Etat dont la plus haute Administration et dans le secteur privé règne toujours ; mais en silence avec le changement actuel de logiciel sur la vision des phénomènes et des réalités humaines.

    Puisque les commerçants sont aisément complices des terroristes ou des djihadismes pour la préservation de leur vie et de la prospérité de leurs affaires, un travail d’éducation patriotique à leur égard s’avère plus que nécessaire. De façon générale, puisque la question de la moralité n’est pas le point fort de la personnalité des commerçants, il importe de mettre l’accent sur l’éducation civique de ce type d’individus en vue de les conduire à une certaine moralité citoyenne. A l’égard de tous les Burkinabè, le chef de l’Etat ne doit pas faire l’économie d’une propagande permanente à la Thomas Sankara en vue de convertir tous les esprits à l’attachement à la valeur des notions patriotiques. La Patrie, c’est l’unité de tous les peuples du Burkina Faso ; l’esprit partisan, comme celui de la complicité avec les terroristes est la voie du désordre, du chaos et la mort de l’Etat burkinabè. A cet effet, il importe, qu’à l’avenir, l’Etat burkinabè songe à légiférer sur les activités de l’orpaillage afin de mieux contrôler l’identité des jeunes gens qui y travailleraient.

      Somme toute, comme les Talibans, cette guerre entreprise par l’Etat burkinabè contre toutes les formes de terrorisme et de djihadisme n’est gagnable qu’à la seule condition de compter sur les renseignements émanant des diverses couches de la population burkinabè ; à la seule condition qu’elle consente à rester fidèle à l’Etat burkinabè. Ceci nécessite l’adhésion des milieux commerçants et de tous les autres milieux de la population du pays au niveau du recueil des informations et des renseignements à relatifs à l’identification des terroristes et autres figures du djihadisme religieux. C’est en incorporant les réseaux ou les systèmes de renseignements les plus discrets et les plus élargis possibles au milieu et dans les populations mitées par les formes du djihadisme que l’Etat burkinabè peur espérer mettre fin un jour à toutes les figures de terrorismes qui s’auto -secrètent au Burkina Faso. D’où l’importance de l’engagement de toutes les femmes burkinabè, qui sont des sources d’information majeures. Sinon, au regard du chômage massif des jeunes générations, qui sont en possession de grands diplômes universitaires mais qui ne leur sont d’aucune utilité, les recrutements de possibles djihadistes ou terroristes, ne cesserait d’empoisonner la vie des citoyens et des gouvernements.

     Le jeune Président du Faso, Ibrahim Traoré, a mis l’accent sur l’intensification et les opérations de l’armée, par une organisation plus efficace de celle-ci de telle sorte que l’armée puisse intervenir en même temps que les attaques des terroristes. Auparavant, cette même armée était presque inefficace puisque les ripostes étaient toujours tardives en raison du flou qui régnait au niveau de la hiérarchie de celle-ci. L’Etat ne doit pas lésiner sur les moyens de mettre partout dans le pays des agents de renseignement qui pourraient alerter l’Etat le plus rapidement possible ; ou les autorités administratives locales en même que les menaces terroristes pour opérer une synchronisation des attaques et des ripostes. En ce sens, il importe de décentraliser les ordres hiérarchiques. Si ceux-ci viennent du chef-lieu des régions qui sont attaquées au lieu de Ouagadougou seulement, il est certain qu’on arriverait à un état d’opérativité plus grand, plus efficace, plus rapide et plus rassurant pour les populations locales et nationales. Autrement, les ordres de mission militaire seront toujours en retard par rapport à la promptitude des réactions ou des attaques terroriste ou djihadistes.

      En dernier ressort, seule une éducation rigoureuse et stricte sur les plans intellectuel et moral peut opérer une révolution des mentalités des générations de demain. Telle est, entre autres objectifs, la finalité majeure de PEDIA. On sauvera, ainsi, le pays de la décadence à tous points de vue. A cet effet, il convient d’imposer un contrôle sévère sur la logomachie des opinions imbéciles des fameux réseaux sociaux. Car c’est le règne de l’opinion spontanée et non pas réfléchie et la prétendue liberté de pensée. C’est aussi une manière de combattre farouchement les formes multiples de la corruption au niveau de l’Etat. J’avais proposé, dès mon retour au Burkina Faso en octobre dernier, des stratégies subtiles pour récupérer tout l’argent public gaspillé par les agents de l’Etat ; détourné par leur soin ; qu’il s’agisse de l’Etat ou des structures privées. En mettant fin au travail des enfants, au principe généralisé de la facilité (on peut tout obtenir à moindre coût, comme l’enrichissement personnel sous toutes ses formes), l’éducation doit développer chez les élèves et étudiants le sens de l’effort et du travail bien fait, la volonté d’exigence vis-à-vis de soi-même pour réussir dans la vie.

Capitaine Thomas Sankara, défenseur acharné des intérêts de son peuple et des Africains, authentique patriote : un modèle à imiter

Suite : la question du terrorisme au Burkina Faso

Source : Entretien de Alain Foka avec Paul Henri Sandaogo Damiba

Paul Henri Sandaogo Damiba : « Nous avons eu beaucoup de résultats, mais on n’en a pas parlé »

Lefaso.net • lundi 27 février 2023 à 22h35 min

Depuis son renversement à la tête de l’Etat, Paul Henri Sandaogo Damiba, retiré au Togo, n’avait plus donné de nouvelles. A travers un entretien avec le journaliste de RFI Alain Foka, diffusé le dimanche 26 février 2023, l’ancien chef de l’Etat burkinabè a enfin rompu le silence, revenant ainsi sur certains axes majeurs de sa gouvernance. Au menu des échanges, l’épineuse question de la sécurité, le choix des partenaires dans la lutte contre le terrorisme, sa vision de la réconciliation, ses relations avec les chefs d’Etat du Mali et de la Guinée, son retour au bercail, lui qui dit avoir hâte de retrouver « le pays de ses parents et de ses grands-parents », etc. Les points saillants de l’entretien ci-après.

Le problème des Burkinabè, ce sont les Burkinabè

« Notre problème est majoritairement interne ». Telle est, selon Paul Henri Sandaogo Damiba, la raison de la persistance du phénomène du terrorisme au Burkina. « C’est vrai qu’il y a l’influence des groupes des grands réseaux extrémistes. Nous avons pu amoindrir l’influence de ces réseaux là sur nos groupes, mais le problème est majoritairement interne. Ceux que nous combattons sont majoritairement des Burkinabè de sang résidents au Burkina Faso et par moments, dans certaines portions hors de contrôle de notre pays », a-t-il renchéri.

Le Burkina courtisé par des sociétés militaires russes, sud-africaines…

La prise du pouvoir du lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba a suscité une ruée des partenaires militaires auprès du pouvoir pour proposer leurs offres de services dans la lutte contre le terrorisme. Selon ses dires, les offres sont venues de partout, seulement, il ne les a pas acceptées car il estimait que ce serait froisser la fierté des Burkinabè qu’il estimait capables eux-mêmes de se tirer d’affaire. « Nous avons été contactés par des sociétés russophones, sud-africaines et même des sociétés basées en Afrique de l’Ouest. Elles se proposent d’envoyer leurs personnels occuper une zone et nous aider. Bien sûr avec en contrepartie des paiements. Mais nous n’étions pas dans cette dynamique-là.

C’est ce qui m’a fait dire à Bobo que quand quelqu’un se bat pour quelque chose, ça devient sa chose. C’était une manière de dire que notre fierté nationale, notre intégrité, notre côté burkinabè serait mal vu. Tant qu’on peut trouver des solutions entre nous, pourquoi ne pas trouver ces solutions là au lieu de passer par un tiers. Si nous prenions aujourd’hui d’autres partenaires qui viennent, qui ne connaissent pas nos réalités, qui ne connaissent pas nos populations, qui ne connaissent pas nos habitudes, qui ne connaissent pas le mode d’action des groupes armés, comment ces partenaires peuvent être efficaces ? » a-t-il expliqué. Au sujet d’une éventuelle arrivée du groupe paramilitaire russe Wagner au Burkina, il répondra : « je n’ai pas rencontré Wagner ».

Rapports avec les forces françaises installées au Burkina

« A partir de janvier (2022, Ndlr) nous avons trouvé des forces étrangères, notamment françaises, stationnées au niveau de notre pays. Nous avons eu des échanges avec ces forces et nous leur avons demandé de nous accompagner pour qu’on puisse avoir des résultats, œuvrer à la stabilité » a laissé entendre Paul Henri Sandaogo Damiba, à la question de savoir quels étaient ses rapports avec les forces étrangères sur place. Aussi, contrairement à certains qui croient dur comme fer qu’il était un président à la solde de la politique française, l’ancien chef d’Etat explique que les relations du MPSR 1 avec les forces françaises n’étaient pourtant pas toujours au beau fixe. En effet, il estime que son pouvoir a été incompris de ces forces-là, qui attendaient d’être confortées dans l’idée qu’il est réellement là pour les intérêts du peuple burkinabé.

« Au tout début, il faut convaincre. Il faut convaincre pour que les gens comprennent la dynamique actuelle. Tant qu’on n’a pas convaincu un partenaire particulier, c’est difficile que le partenaire s’engage. Ce ne sont pas seulement eux qui n’avaient pas confiance, il y avait les groupes politiques et la communauté régionale. Ils attendaient de voir si ce sont des gens qui sont venus pour aider le pays où ce sont des gens qui sont avides du pouvoir. Il y a toujours un temps qu’on doit prendre pour convaincre et pour que les gens voient vers où vous voulez aller. Et à ce sujet, avec les forces françaises, on a senti qu’il y avait des incompréhensions. Dans les interactions, on a eu quelques contradictions sur le plan de la communication, aussi sur l’engagement opérationnel. Sur le plan opérationnel, nous leur avons demandé de nous soutenir dans la fourniture de renseignements.

En tout cas par moment, nous n’avons pas obtenu les renseignements souhaités. Cet état de fait, nous l’avons exprimé. On le leur disait et il y a des correspondances qui existent » a-t-il lâché.

En dépit de ces désaccords, le lieutenant-colonel Damiba reconnaît que les forces françaises ont appuyé les forces militaires burkinabè, à d’importants moments de leurs interventions sur le terrain. « Quand on a des évènements à certaines heures de la nuit, ils nous viennent en secours. Quand on a des blessés, ils nous appuient. L’ensemble des militaires qui ont opéré véritablement dans les contrées de notre pays peuvent attester que nous avons eu des soutiens pour relever nos blessés, évacuer nos corps, certains apports en renseignements, de l’appui-feu. Mais tout cela, c’est avec le temps que ça s’est installé. On était dans une dynamique de gagner ce qui était avantageux pour nous, pour l’intérêt du pays ».

L’approvisionnement des terroristes en armes

Au cours de l’entretien, Paul Henri Sandaogo Damiba est revenu sur les sources d’approvisionnement des groupes armés terroristes en armes. « Il y a des armes qui sont achetées dans la contrebande. Il y a des réseaux financiers extérieurs et internes aussi. Avant, on parlait de rançons, mais à force de durer sur le terrain, les groupes développent des économies telles que les vols de bétails, l’exploitation de l’or, etc. Ce sont des canaux qui leur permettent d’avoir de l’argent. Ils ont accès aux grands réseaux de contrebande, aux armes récupérées à certaines positions des FDS et à des réseaux extérieurs. Il y a aussi par exemple des convois qui peuvent passer légalement dans nos pays et ne pas arriver à bonne destination ».

A la question de savoir qui fabrique ces armes, il répondra : « il y a par exemple deux types d’engins explosifs. Les engins explosifs improvisés, fabriqués artisanalement et il y a ceux conventionnels, fabriqués dans des usines précises. Dans les années 2018, on a découvert des mines de fabrication qui ont quitté certaines zones de la Lybie et qui étaient arrivées au Burkina. Actuellement par exemple, la kalachnikov est l’arme la plus utilisée. Ce sont des armes du pacte de Varsovie. Beaucoup d’entreprises et beaucoup de sociétés produisent ces armes-là. Mais sur le terrain, ce qu’on retrouve ce sont des versions de Kalash, de fusils mitrailleurs et de RPG 7 ».

Ses relations avec ses homologues du Mali et de la Guinée

Pour Paul Henri Sandaogo Damiba, les pays sont libres d’opter pour un partenaire au profit d’un autre et ce qui était prôné durant ses huit mois de gouvernance, c’est la diversification des partenaires.

A la question de savoir s’il n’avait pas un parti pris pour la France, si fait qu’il avait maille à partir avec ses homologues du Mali Assimi Goïta et celui de la Guinée, Mamadou Doumbouya, l’ancien chef de l’Etat du Burkina s’est voulu clair : « nous n’avons pas choisi d’être avec la France, nous sommes venus trouver des Français. C’était de voir d’abord quels partenariats opérationnels pouvaient être maintenus et améliorer avec eux ». « Je n’avais pas particulièrement de mauvaises relations avec Assimi Goïta. On avait de très bons rapports. On avait décidé d’engager au niveau de la frontière des opérations militaires conjointes, mais en excluant les partenaires. C’est un problème commun au Burkina et au Mali. On avait dit que pour la question frontalière, ce sera entre nos unités. Pour le président Doumbouya, on avait des relations fraternelles », a-t-il confié.

Des acquis engrangés, quoiqu’on dise

Si pour beaucoup, le MPSR 1 a plus contribué à tirer le pays vers le bas plutôt qu’à le sortir de l’ornière, Paul Henri Sandaogo Damiba soutient que des résultats ont été obtenus et des acquis engrangés. « Contrairement à ce qui est raconté, nous avons eu beaucoup de résultats, mais on n’en a pas parlé. Dès le mois de février, nous avons commencé à faire des opérations de ciblage. On ne peut pas mettre cela à la disposition du public, mais il y a des groupes de personnels qui travaillaient sans relâche 24h sur 24 pour désorganiser les réseaux terroristes. On a comptabilisé pas moins de 170 à 175 sorties d’opération de ciblage.

Chacune de ces opérations a visé et détruit des éléments armés. Ce sont des résultats que nous n’avons pas voulu porter à la connaissance du public mais je pense que tout est disponible. Notre plus grande réussite était de démobiliser les groupes armés. En son temps, des anciens combattants sont revenus donner leurs armes. Ce sont des résultats dont on ne parle pas suffisamment. On était autour d’une centaine de personnes. On avait beaucoup de promesses de personnes mobilisées pour ramener d’autres.

Mais malheureusement cette démarche est tombée à l’eau. Il faut savoir aussi que les groupes armés ne sont pas contents quand il y a des défections dans leurs rangs. Il faut savoir jouer sans trop exposer les autres qui vont être désengagés » a-t-il révélé.
En outre, conformément aux quatre objectifs que sont la lutte contre l’insécurité, le soutien humanitaire aux personnes déplacées internes, l’amélioration de la gouvernance et enfin la question de la réconciliation nationale, il estime qu’il y a eu des avancées considérables, quoique tout n’est été atteint.

« Il y a eu des accalmies dans les régions de l’Est, du Nord, de l’Ouest et du Sud-ouest. Aussi, quand on venait, le nombre de personnes déplacées étaient autour de trois millions. Notre travail a permis de réduire le nombre de personnes déplacées. On était descendu autour de deux millions 400. Ce sont des tableaux qui existent. Il y a des régions où les populations repartaient. En termes de gouvernance, je peux dire sans vraiment nous vanter qu’il y a rare de systèmes politiques qui ont été aussi transparents dans leur système que le système que nous avons conduit », a-t-il renchéri.

Un homme en paix avec sa conscience

Dans leurs premières apparitions au moment du coup d’Etat, les nouveaux maîtres du pays fustigeant le pouvoir en place, l’accusant de se sucrer sur le dos des populations qui souffrent le martyr. A ces velléités de malversations qui faisaient directement allusion au président Paul Henri Sandaogo Damiba, ce dernier répondra qu’il est blanc comme neige.

« Si j’ai pris un franc de l’Etat pour m’enrichir personnellement, je suis prêt à répondre devant les juridictions de mon pays. Est-ce-que quand vous me voyez je ressemble à quelqu’un qui a emporté quelque chose ? Les camarades se moquaient de moi. Ils disaient qu’ils n’ont jamais vu un président aussi pauvre que moi. C’est vrai qu’il y a beaucoup de choses qui se disent sur les réseaux sociaux. Mais c’est vraiment du fake. Ce sont des choses montées juste pour salir. Moi je suis en paix avec ma conscience », dira-t-il à ce propos.

Sa vision de la réconciliation

Le 8 juillet 2022, Paul Henri Sandaogo Damiba convoquait les autres chefs d’Etat autour d’une table ronde pour discuter des questions de la réconciliation. Au nombre de ses hôtes, l’ancien président Blaise Compaoré qui venait d’être condamné par la justice militaire pour le meurtre de Thomas Sankara. Interrogé sur le sens profond de cette réunion qui visiblement a fait choux blanc en raison de l’absence des trois anciens présidents, il répondra : « Ce n’était pas pour faire une réconciliation. Dans l’intitulé de la correspondance, c’était pour œuvrer pour la cohésion sociale. C’était pour m’asseoir avec les devanciers puis leur demander de nous aider. Cela ne sert à rien que je dise que je peux alors que chacun peut contribuer. L’initiative de cette réunion, au fond, c’était pour demander aux devanciers d’accompagner, de nous aider parce que la situation actuelle du Burkina n’est plus une question d’un clan ou d’une personne. Je pense que toute dynamique qui ne va pas aller dans le sens de réunir tous les fils autour de l’objectif qui est de préserver le pays sera contre-productive », a-t-il laissé entendre.

« Il faut éviter qu’on répartisse l’Afrique une seconde fois »

Au cours de l’entretien, Paul Henri Sandaogo Damiba dit observer de près ce qui se passe au Burkina et se refuse d’y donner lecture car dit-il : « ce que j’observe ne me permet pas de juger pour le moment ». Cependant, estime-t-il, cette course vers les partenaires surtout en ces temps de crise sécuritaire risque de reproduire la sombre histoire de la conférence de Berlin de novembre 1884 à février 1885, où l’Afrique a été partagée comme un gâteau d’anniversaire.

« Je suis certains évènements qui se passent dans mon pays. Mais je pense quand même qu’il faudrait observer en tant que décideur politique et responsable d’un pays, de la prudence. Je soulignais tantôt les difficultés qui peuvent exister entre les responsables de nos pays et puis les différents partenaires aussi qui sont à nos côtés. Le piège qu’il faudrait tout faire pour éviter est qu’on n’aille pas encore vers une nouvelle répartition de l’Afrique », dira-t-il pour conclure.

Son retour au bercail

Au Togo depuis le 2 octobre 2022, Paul Henri Sandaogo Damiba dit avoir le mal du pays. Et même si ce point n’a pas encore été abordé avec les autorités actuelles, il estime que les portes du Burkina Faso ne lui sont pas fermées. « Le pays me manque même si je suis dans de bonnes conditions à Lomé. Je suis pressé de retrouver le pays de mes parents et de mes grands-parents. Le sang qui coule dans mes veines est burkinabè », a-t-il rappelé.

A la question de savoir si ce retour ne serait pas pour récupérer le fauteuil qui lui a été arraché, il répondra : « je ne suis pas intéressé par un quelconque pouvoir politique. Le pouvoir politique corrompt l’homme. J’ai ma personnalité et mes valeurs que je garde bien pour moi. Je veux simplement être utile pour les autres ».

Erwan Compaoré
Ramata Diallo
Lefaso.net
Source : Entretien de Alain Foka avec Paul Henri Sandaogo Damiba


[1] Je viens d’écrire un livre, à la suite de Joseph-Ki-Zerbo, sur le système éducatif francophone en Afrique noire en voie de faillite totale. Ce sont les résultats de ces analyses qui me permettent de parler, à présent d’effondrement. Il a pour titre : LA PRÉDICTION PAR JOSEPH KI-ZERBO DE L’ÉCHEC SCOLAIRE DES SYSTÈMES ÉDUCATIFS DE L’AFRIQUE FRANCOPHONE DÈS LES ANNÉES 1960. Ce livre sera publié cette année par L’Harmattan Burkina, dès mon retour de la France. L’Etat ou les ministres de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur pourraient s’y intéresser en vue de faire connaître la pensée de Joseph Ki-Zerbo sur cette thématique ; et aussi la nécessité de réinventer l’Instruction civique, les valeurs morales et patriotiques.

[2] Léviathan (Folio/Essais, Paris 2000)

[3] J’ai mentionné ce cas dans une Annexe de mon livre à publier : LA PRÉDICTION PAR JOSEPH KI-ZERBO DE L’ÉCHEC SCOLAIRE DES SYSTÈMES ÉDUCATIFS DE L’AFRIQUE FRANCOPHONE DÈS LES ANNÉES 1960. Je démontre que des pays africains ont connu un grand succès en matière d’éducation modèle.

[4] Cette opération avait été approuvée le 17 mars 2011 par le Conseil de sécurité par dix voix à zéro avec cinq

abstentions dont la Russie.

[5] Une terre promise- Trad. Pierre Demarty, Charles Recoursé et Nicolas Richard – (Fayard, Paris 2020, p.p. 786-

[6] Selon un article du « Canard enchaîné », c’est François Hollande soi-même qui força le président malien de lui adresser une lettre comme si c’était lui-même, donc l’Etat malien qui demandait à la France d’intervenir militairement pour sauver son pays de l’invasion des djihadistes islamistes.

[7] Même si ces chefs d’Etats étaient tombés d’accord avec les suggestions de M. Alassane Ouattara, il n’était pas certain qu’ils auraient réussi à faire quelque chose d’efficace pour arrêter l’expansion des djihadistes vers Bamako ou vers les pays du sud en vertu d’un double handicap. D’une part, aucun de ces pays ne dispose d’armes modernes, solides et sophistiquées. Tous ont encore un armement classique, donc inefficace face à l’armement lourd des terroristes. D’autre part, avec quels moyens financiers auraient-ils pu faire face aux dépenses d’une guerre de longue haleine ? Déjà, certains Etats n’ont même pas un budget suffisant pour payer correctement leurs militaires. Dans ce cas, leurs armées auraient été en mesure de refuser de s’engager. Autant dire que sans l’aide des pays étrangers, les pays africains subsahariens, notamment francophones, après 60 ans d’indépendance supposée, sont toujours incapables de défendre soi-même leurs territoires d’une quelconque invasion étrangère. Quel triste sort !

[8]Inhttps://bfmtv.com/international/afrique/ouattaraespereune-une-résolution-de-l-onu-sur-le-mali-sous-peuAn-201207260013.htlm

[9] Mais, de quelle réconciliation nationale pourrait-il s’agir ? Se réconcilier avec qui précisément puisque les groupes djihadistes sont en désaccord total entre eux, même en conflit ouvert les uns avec les autres quant à leur finalité, à leur but ? Car ils ont des intérêts absolument divergents. Ces chefs d’Etat du Burkina Faso ou du Mali, s’ils étaient passés à l’acte, auraient eu en face non pas un entité représentative l’ensemble, mais des groupuscules qui se font la guerre pour l’occupation de l’espace comme des trophées de conquêtes.

[10] In « Le Canard enchaîné » -mercredi 11 avril 2012 « Un « Afghanistan au sud de l’Europe »

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